Notre vocation est de demeurer en Dieu — Diocèse de Belley-Ars

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Notre vocation est de demeurer en Dieu

Notes de l’homélie du 5° dimanche de Pâques, le 10 mai 2020, en la chapelle de l'Aumônerie, à Bourg-en-Bresse, en confinement. (Lectures année A : Actes 6, 1-7 ; Psaume 32 ; 1 Pierre 2, 4-9 ; Jean 14, 1-12)

 

Tout être humain aspire naturellement à trouver une demeure ; un lieu stable et confortable où il peut se sentir pleinement chez lui ; un endroit où il peut vivre en sécurité, connaître la paix et goûter la joie de vivre ; un lieu accueillant, où il trouvera lui-même plaisir à accueillir les autres.  Pensez aux jeunes couples : un de leurs premiers soucis est généralement d'acquérir et d'aménager un appartement ou une maison bien à eux, où il fera bon vivre. Pensez aussi aux futurs retraités : ils s'organisent souvent un havre de paix pour couler leurs vieux jours et accueillir famille et amis. 

 

Mais, beaucoup plus profondément, au-delà de l’occupation d’espaces terrestres, en nous faisant plus ou moins illusion sur leur caractère définitif, comme si nous ne devions jamais mourir et quitter cette terre, l'homme cherche également un lieu que nous pouvons qualifier de "spirituel ". Tout homme cherche en effet à se situer, à trouver sa place dans l’univers, à saisir d'où il vient, où il va, et comprendre le sens de ce qu'il fait sur terre. Et cela est particulièrement sensible en ce temps de confinement, où nous percevons avec plus d’acuité notre finitude et la réalité de la mort. 

 

Or voici que Jésus nous révèle précisément aujourd'hui que ce lieu spirituel, auquel aspire la créature humaine, cette demeure éternelle, au-delà des habitations terrestres passagères, c'est la maison de son Père du ciel. Et il précise même : " Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures," signifiant par-là qu’il y a de la place pour tout le monde. De fait, comme l’a si bien exprimé Saint Augustin, notre âme est sans repos tant qu'elle ne repose en Dieu.

 

Cependant, cette demeure céleste nous est difficilement accessible. Nous aspirons à rencontrer Dieu, à demeurer en Lui, mais nous expérimentons en même temps notre incapacité radicale à accéder au Père par nos seules forces. Pour Jésus, les choses sont claires : " Là où je vais, vous ne pouvez pas aller " (Jean 13, 33), affirme Jésus à ses apôtres. Tout comme il a dit aux autorités juives : " Vous me chercherez, et vous ne me trouverez pas ; et là où je suis, vous ne pourrez pas venir " (Jean 7, 34).

 

Pourtant, Jésus nous a fait à l’instant cette belle promesse : " Quand je serai parti vous préparer une place, je reviendrai et je vous emmènerai auprès de moi, afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi." Jésus se présente donc comme celui qui nous ouvre l’accès à la maison du Père : " Pour aller où je vais, vous savez le chemin " annonce-t-il. Ce chemin, il l'est en personne : " Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi. " Comme il l’affirmait dimanche dernier : " Moi, je suis la porte " (Jean 10, 7 et 9).

 

C'est en effet dans le Christ seul que la demeure du Père nous devient accessible. Cela est possible parce que Jésus ne craint pas de sortir du sein du Père. Il n’hésite pas à abandonner les avantages de la condition divine (voir Philippiens 2, 6-7) pour venir demeurer parmi nous (voir le prologue de St Jean 1, 1-18). Et c’est résolument qu’il emprunte le chemin pascal, qu’il prend sur lui notre mort, pour nous faire passer au Père. C’est ainsi que Jésus vient nous ouvrir la porte du lieu où nous sommes attendus par le Père, avant même la fondation du monde (voir Ephésiens 1, 4-5). Le Christ, qui est vérité et vie de toute éternité, s’est fait chemin pour nous ! C'est assurément en lui que l'homme devient capable d'entrer auprès du Père : " Je pars vers le Père (…) Personne ne va vers le Père sans passer par moi." 

 

Comme l’apôtre Philippe, nous avons bien du mal à prendre conscience du trésor inestimable que l'Incarnation du Fils de Dieu a mis à notre portée. Beaucoup d’êtres humains, comme Philippe, demandent en fait : " Seigneur, montre-nous le Père ; cela nous suffit."  Aussi nous faut-il ouvrir le cœur et accueillir le cadeau inouï qui nous est fait : " Celui qui m'a vu a vu le Père (...) Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ! (...) Le Père qui demeure en moi fait ses propres œuvres." En accueillant Jésus qui vient à nous et en vivant unis à Lui, nous avons effectivement plein accès à Dieu le Père, nous sommes réellement rendus capables de communier à Dieu. 

 

Dimanche dernier, c’était la Journée Mondiale de prière pour les Vocations. Rendons grâces à Dieu pour tous les consacrés qui ont librement renoncé au confort de quelque demeure terrestre douillette, pour nous signifier, comme dit saint Paul, que " Nous avons un édifice construit par Dieu, une demeure éternelle dans les cieux, qui n’est pas l’œuvre des hommes " (2 Corinthiens 5, 1). Nous avons besoin des personnes consacrées au Christ pour manifester au monde le bonheur d’appartenir au Christ, qui est le chemin de cette demeure éternelle.

 

Mais, poursuivons notre méditation de la Parole de Dieu ! Alors que, dans l’Evangile, Jésus, " Le Fils de l’homme (qui) n’a pas d’endroit où reposer la tête " (Luc 9, 58) vient de nous inviter à demeurer avec lui dans le Père, voici que, paradoxalement, dans la deuxième lecture nous entendons aussi Saint Pierre nous signifier notre vocation à être la demeure de Dieu : " Vous aussi, comme pierres vivantes, entrez dans la construction de la demeure spirituelle ! " Saint Pierre nous révèle que le projet de Dieu est de venir habiter en nous. Son désir est de faire de nous sa demeure : " Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il demeurera avec eux ; ils seront ses peuples et lui-même, Dieu-avec-eux, sera leur Dieu ", révèle le livre de l’Apocalypse (Apocalypse 21, 3). 

 

La caractéristique majeure de cette demeure, c'est que nous n'en sommes pas les bâtisseurs. Contrairement à ce qu'on entend fréquemment dire à tort, nous ne construisons pas l'Eglise, pas plus que nous n'édifions le Royaume de Dieu, car ceux-ci nous sont donnés d'en-haut : " Et la Ville sainte, la Jérusalem nouvelle, je l’ai vue qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu ..." (Apocalypse 21, 2), affirme le visionnaire du livre de l’Apocalypse.

 

Cependant nous sommes étroitement associés à cette construction, dont Dieu seul est le maître d’ouvrage : " Nous sommes des collaborateurs de Dieu, et vous êtes un champ que Dieu cultive, une maison que Dieu construit " (1 Corinthiens 3, 9). Pour cela, l'apôtre nous engage à nous approcher de Jésus : " Approchez-vous du Seigneur Jésus : il est la pierre vivante (...) Entrez dans la construction de la demeure spirituelle ". En entrant en communion avec Jésus, par lui et en lui, nous sommes mis en communion avec le Père ; et le Père vient établir sa demeure en nous, tout comme il demeure constamment dans le Fils unique. Il fait alors de nous des pierres vivantes pour construire son temple saint. 

 

Notre vocation n’est-elle pas extraordinaire ? Jésus vient d’affirmer par deux fois : « Je suis dans le Père et le Père est en moi ». Puisque Jésus s’est uni à nous, et que le Père a fait de nous ses enfants adoptifs, notre vocation est de demeurer en Dieu, de faire aussi de chacune de nos personnes la demeure de Dieu, et de devenir tous ensemble le temple de Dieu !

 

Et que fait-on habituellement dans un temple ? Comme vous le savez, on offre des sacrifices ! Eh bien, Dieu nous rend capables, dans le Christ, de faire de chacune de nos existences un vivant sacrifice : " Entrez dans la construction de la demeure spirituelle, pour devenir le sacerdoce saint, et présenter des sacrifices spirituels, agréables à Dieu, par Jésus Christ ". L’objectif de ce sacrifice est clair : c’est " Pour que vous annonciez les merveilles de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière." Désormais, c'en est fini des sacrifices anciens : sacrifices sanglants d'animaux. Maintenant le vrai sacrifice réside dans l'offrande quotidienne de soi-même. " Tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus, en offrant par lui votre action de grâce à Dieu le Père." (Colossiens 3, 17), recommande saint Paul. 

 

J’attire votre attention sur cette dimension d’offrande de soi dans tout ce que vous faites quotidiennement. Car cette période douloureuse d’impossibilité de rassemblement, qui nous prive de la dimension fraternelle et de la communion eucharistique, est l’occasion de valoriser le caractère sacrificiel de l’Eucharistie. Nous avons certainement à entendre l’appel à faire offrande de notre vie, avec le Christ, afin que toute notre existence devienne, comme dit la Prière eucharistique n° 4, « une vivante offrande à la louange de la gloire du Père ». 

 

Pour finir, Jésus nous déclare quelque chose d'assez étonnant :" Celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais. Il en fera même de plus grandes, parce que je pars vers le Père. " En y réfléchissant bien, c'est simple et logique. Jésus nous unit à lui. Il fait de nous les membres de son Corps. Il nous donne en partage l'Esprit Saint envoyé par le Père. Cet Esprit fait que Dieu demeure en nous, ses enfants d’adoption, et que le Père peut donc accomplir en nous ses propres œuvres, exactement comme il les accomplit en son Fils Jésus. 

 

Il nous est uniquement demandé de consentir à l’œuvre de Dieu en nous ; de nous laisser conduire avec docilité par l’Esprit Saint. Il nous est demandé de vivre l’obéissance de la foi et de laisser s’exercer ainsi la fécondité de la Parole de Dieu, comme nous le montre le livre des Actes des Apôtres, entendu en première lecture. Il suffit de relire l'histoire de l'Eglise et de contempler la vie des saints pour vérifier l'accomplissement de cette promesse de Jésus. C'est bien vrai, Dieu agit dans son Eglise ; il opère des merveilles dans les baptisés. Et puisque les membres du Corps du Christ sont nombreux de par le monde, l’œuvre du Père se répand davantage. Ici nous pouvons apprécier la pertinence de ce que signifiait Bossuet lorsqu'il affirmait : " L'Eglise, c'est Jésus Christ répandu et communiqué au monde ".


 

+ Pascal ROLAND