Dimanche 9 janvier 2022
Homélie du dimanche 9 janvier 2022 le baptême du seigneur année C.
Chers frères et sœurs, aujourd’hui se termine l’octave de Noël .Nous sommes encore revêtus du blanc et dès lundi nous revenons dans le temps ordinaire en vert. Aujourd’hui c'est le baptême du seigneur au Jourdain par Jean le -Baptiste. Le père Donatien m’a confié le prêche et je l’en remercie. Depuis maintenant plus d’un an je participe à la vie liturgique de nos assemblées. Encore et toujours en formation sur le chemin auquel le seigneur m’a appelé mes homélie sont appelées à se modifier. L’an dernier au cours de l’année B le thème pastoral de groupement était « suivre le Christ » et je me suis attaché au cours de mes prêches à m’inspirer directement et profondément des textes proposés par la liturgie de la parole car pour suivre le Christ il faut commencer par écouter et suivre ses paroles.
Nous sommes maintenant en année C et le thème de l’année de notre groupement est la famille. Mes homélies seront donc peut-être plus éloignées des textes et proposeront un axe de réflexion ou de méditation, autour de la pédagogie de Dieu avec son peuple, en bon père de famille. Rappelez-vous lors du premier dimanche de l’Avent ou Dieu voulait nous apprendre à faire du tricycle avec les trois roues, la foi l’amour et l’espérance et nos petits mollets pour pédaler afin de se préparer à Noël
Lors de la veillée de Noël la pédagogie de Dieu était bien différente il nous invitait à modifier le jeu de cache-cache. Dieu nous expliquait qu’il souhaitait se laisser trouver par chacun d’entre nous pour plutôt jouer un jeu de type cœur à cœur. Ainsi au cours de l’année je tenterai de conserver ce fil rouge de la pédagogie de Dieu avec son peuple un peu comme la pédagogie ou l’éducation que des parents peuvent mettre en place en famille avec leurs enfants.
Alors aujourd’hui que dire à partir de cet Évangile de Luc sur le baptême du seigneur. Cet Évangile se situe au début de l’Évangile de Luc au chapitre3 dans une partie qui se nomme la préparation du ministère de Jésus. On n’y retrouve bien sûr le baptême de Jésus, la généalogie de Jésus qui à travers Joseph, est fils de David et la tentation au désert. Ensuite le ministère public de Jésus commence en Galilée. Chaque année après Noël nous avons ce texte du baptême de Jésus repris par les quatre évangélistes. Luc insistant plus sur l’humanité de Jésus. Ce texte nous l’avons déjà entendu, lu, peut-être réentendu .il arrive chaque année au même moment. Alors que la Bible est composée de plus de 2000 pages pourquoi finalement cette répétition dans le choix des textes ? Certains pourraient dire ce texte je le connais par cœur et reprendre la phrase célèbre dans le livre de Qohelet. » Rien de neuf sous le soleil.
Nous, enfants de Dieu, nous aimerions bien un peu de nouveautés dans les textes, un peu de progrès. Il est presque normal de s’embêter au cours de la messe si c’est toujours les mêmes textes qui sont sortis de la Bible, à la même période. Nous sommes dans un monde qui bouge, voir même qui bouillonne. Nous sommes en quête de nouveauté, de progrès, de sensation pour échapper à une certaine routine, à certaines répétitions mortifères qui nous donnent l’impression de nous enfermer dans une certaine logique ennuyeuse et de faire du sur place. Parfois, nous sommes happés par un flot continu d’informations, de nouvelles théories anthropologiques sur les hommes et les femmes, un mouvement continuel qui semble être un moyen d’échapper aux répétitions et de remplir un vide. C’est en tout cas un peu le reflet de notre société actuelle ou la volonté de zapper, de changer de façon incessante, de travail, de partenaire, de découvrir toutes les nouveautés possibles est une voie de développement personnel permettant d’échapper à la routine. Tout semble mieux sous un autre soleil !
Le principe de la répétition fait que les choses sont exprimées plusieurs fois de façon quasiment identique. Alors pourquoi autant de répétition dans le choix des textes ? Quelle est la pédagogie du seigneur dans la liturgie de la parole ? Y a-t-il, frères et sœurs, quelque chose de neuf sous le soleil ?
Et pourtant chers frères et sœurs, la répétition fait partie de façon anthropologique et fondamentale de la dimension de tout être humain.
La répétition est au cœur de notre vie humaine horizontale
Pour qu’il y ait répétition il faut que la mémoire soit à l’œuvre. Dans l’oubli rien ne se répète si aujourd’hui vous vous dîtes à ce texte du baptême de seigneur je l’ai déjà entendu plein de fois cette réflexion est déjà rassurante un ça veut dire que vous avez déjà entendu ce texte et que vous l’avez gardé en mémoire. Et de que vous êtes déjà venus à la messe à la fin de l’octave de Noël. La répétition laisse des traces, des souvenirs , des déjà vus ,des déjà vécus qui sont une matrice dans laquelle la notion de sens se construit.
La répétition dans notre vie de tous les jours est un socle de stabilité. Tous les actions rituelles automatiques que nous faisons chaque jour parfois au lever parfois avant de s’endormir sont indispensables pour marquer le temps qui passe et apporte assurance et réassurance pour continuer à avancer. Saint-Exupéry (qui pourtant n’était pas saint) écrivait les rites sont dans le temps ce que la maison est dans l’espace. En effet notre maison peut-être dans l’espace ou plus largement dans l’univers est un endroit relativement clos, avec un cadre où l’on peut se sentir en sécurité, avec bien sûr dés portes et des fenêtres pour communiquer avec le reste de l’espace. Les répétitions, les rites sont les événements qui balisent l’espace-temps qui donne un rythme et des repères dans le temps qui s’écoule.
Tous nos apprentissages sont basés sur la répétition.. Demander à des artistes peintres à des musiciens à des sportifs comment s’est fait leur apprentissage ? Des heures à répéter les mêmes gestes avec un pinceau, sur un clavier, ou sur une piste de biathlon, parfois jusqu’à la lassitude. Pas de création sans répétition .Demander à une maîtresse d’école de faire de la pédagogie sans répétition pourrait la mettre dans une situation un peu difficile.
Et puis regardons autour de nous la création : dans la nature tout se répète. Même si on parle de perturbations climatiques, les saisons inlassablement se répètent. Le cycle de la végétation dans le jardin ou dans le potager se répète. Et même quand la nature nous rappelle à notre fragilité humaine les mêmes vagues Covid se répètent. La répétition nous vivons avec.
À l’échelon horizontal de nos vies la répétition est un socle de stabilité et une nécessité pour nos apprentissages, une quasi nécessité pour la créativité à condition que cette répétition où ces rites ne soient point cloisonnés ou enfermant. Entre ces mouvements de répétition il y a la place pour l’émergence de la nouveauté, de la créativité. Les répétitions sont comme une basse continue au clavecin, qui donne une stabilité à la mélodie de nos vies pour soutenir l’émergence d’une voix soprano qui embellit nos vies.
Pour Dieu qui a créé nos vies et il est évident que La répétition est au cœur de la pédagogie de Dieu dans notre vie spirituelle.
Dans la liturgie de la parole. Vous savez bien que le même texte lu et répété ne sera pas perçu de la même façon par chacun d’entre nous et même de façon plus intrinsèque pour chacun d’entre nous en fonction de l’année ou du jour où nous l’entendons. Le texte ne change pas mais c’est nous qui changeons. Les psaumes lorsqu’ils sont psalmodiés apportent une certaine répétition dans les gestes et dans les sonorités du psalmiste qui peuvent parfois être perçues comme ennuyeuses mais pour qui se laisse porter, pour qui se laisse emporter ses répétitions nous permettent de laisser nos cœurs monter vers le seigneur. La répétition est porte de la créativité
Dans la liturgie eucharistique la répétition depuis des millénaires est le socle de stabilité qui permet de vivre pleinement la présence réelle du Christ. Certains parmi vous qui sont fidèles parmi les fidèles communient au corps du Christ près de 70 fois par an pour certains depuis plus de 50 ans. Ces 3500 rencontres répétées avec le Christ n’ont probablement pas laissé le même souvenir la même intensité mais c’est peut-être aujourd’hui au cours de la 3501 unièmes eucharisties que votre cœur va se dilater de bonheur en rencontrant Jésus. La répétition est une promesse.
De façon plus personnelle au cours des temps de prière la répétition est une bienheureuse nécessitée pour chercher ce Dieu qui veut se laisser trouver. Cette répétition peut être temporelle dans la journée comme le matin la prière des laudes à laquelle se sont engagés tous les clercs de l’église et de nombreux laïcs, cette prière du lever du jour qui lance chaque journée. Et que dire de la répétition dans la prière du chapelet. À titre personnel il m’a fallu beaucoup de temps pour accéder à ce type de prière répétitive. Un séjour à Fatima et à Lourdes aident grandement. Dans la prière du chapelet la répétition inlassable des je vous salue Marie est un peu comme la basse continue au clavecin, cet appui ,ce socle qui permet de prendre un peu de hauteur pour un peu comme une voix de soprano trouver Marie dans un cœur à cœur pour nous conduire vers Jésus. La répétition est fécondité.
Et en bon père de famille, Dieu est le champion du monde de la répétition dans l’expression de sa miséricorde et de sa compassion. Même si nous répétons les mêmes mauvais choix, même si nous rabâchons toujours les mêmes reproches, même si nous récidivons inlassablement dans nos manques d’amour, Dieu se répète inlassablement pour nous relever, nous remettre en selle sur le tricyclique, nous faire signe afin de le retrouver et nous proposer toujours plus d’amour. La répétition est fidélité.
Alors oui Seigneur ton utilisation pédagogique de la répétition je la comprends mieux et je vais à nouveau écouter le texte d’Evangile du jour et en percevoir peut être un sens ou un relief diffèrent qu’il y a tout juste 8 minutes et qui préparera mon écoute de l’année prochaine. Reprise de l’Evangile