Décès de l'abbé Bernard Rousset — Diocèse de Belley-Ars

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Décès de l'abbé Bernard Rousset

Mgr Pascal Roland, les prêtres du diocèse
et les prêtres ouvriers de la région,
sa sœur Marie Thérèse Badouard et toute sa famille
recommandent à vos prières

Bernard Rousset

décédé à l’Ehpad Dr Récamier à Belley le 23 mai 2019, à l’âge de 91 ans.
 

Ses funérailles ont été célébrées le mardi 28 mai 2019, à 10h, en la cathédrale St-Jean-Baptiste de Belley. 

Originaire de Grièges, né le 4 mars 1928, ordonné prêtre à Belley le 29 juin 1953, il fût successivement vicaire à Belley (1953-1957) puis à Notre-Dame de Bourg (1957-69), aumônier des Enseignants Chrétiens et du Bureau diocésain (1962-1969), curé d’Artemare et aumônier de l’ACO du secteur de Belley (1969-1972). 

Prêtre ouvrier à Belley depuis 1972, il vécut au Clos Morcel jusqu’en novembre 2018. 

 

Témoignage des neveux et nièces du P. Bernard Rousset, au cours de ses obsèques.

Cher Bernard

C’est avec un sentiment mêlé de grande tristesse et de grande affection, au nom de ta soeur Marie-Thérèse et de ta belle-soeur Mady, absentes aujourd’hui, en notre nom à nous tes 15 neveux et nièces présents ou non, au nom de tes filleuls, et devant cette assemblée, que nous venons te dire adieu. Sache déjà combien ton départ nous touche. Nous n’entendrons plus ton rire, ta voix chaleureuse, nous ne pourrons plus partager ton goût de la fête, ton sens de la convivialité, le récit de tes voyages et de tes rencontres ; nous ne te verrons plus le verre à la main au milieu de tes amis, entonnant un chant. Des souvenirs nous viennent à la volée, que nous puisons dans la mémoire de notre enfance ou de notre adolescence, là où nous t’avons le plus connu, cher Bernard.

Bernard, directeur de la colonie de vacances Mer et Soleil à Cannes, [...] de retour d’une belle balade en montagne dans la vallée de Zinal, préparant la fondue, ou même ramenant de Suisse des meules de gruyère dans sa 4L. Bernard, à l’accordéon sur la scène de l’ancien palais des congrès de Lyon, avec le Père Guy de Fato à la contrebasse et ton neveu Bernard à la batterie. Bernard accompagnant au piano notre oncle Henri chantant La Mer de Charles Trenet, et amenant pas mal d’oxygène dans nos vies d’ados grâce à ta gaîté et ton ouverture d’esprit. Bernard, dans des joutes oratoires parfois orageuses, en famille sur des thèmes sociaux ou politiques. Bernard, prononçant une homélie poignante aux funérailles de ton frère Marc, décédé accidentellement. Bernard procédant aux cérémonies religieuses familiales, baptêmes et mariage. Tous ces souvenirs de bons moments et de plaisir de vivre ou ces souvenirs d’épreuves partagées, que nous voulons retenir.

Comme pour tenter de prolonger un instant ta présence physique et ton incarnation dans cette vie qui s’est achevée, pour tenter de deviner les grands enjeux de ton parcours sur terre, nous souhaitons relater devant cette assemblée tes racines et quelques grandes étapes de ta vie, donnant à chacun quelques clés pour en apprécier toute la richesse.

Tes parents, Mathilde et Marius, sont des amis d’enfance natifs d’un petit village des bords de Saône dénommé Grièges, dans le département de l’Ain, « des fiancés de 1914 » comme on disait, qui se marient en 1917. De leur union, naissent 7 enfants en 10 ans. Pierre (qui décèdera rapidement), Marguerite-Marie, Paul Marie, Marc, Marie Noëlle, Marie Thérèse et toi le petit dernier Bernard.

Ton père, fils unique, a hérité de quelques hectares de terrain agricole, et se lance très tôt dans des cultures innovantes comme la vigne, l’arboriculture et les asperges. Mais ayant dû abandonner son exploitation à cause de problèmes physiques et sous l’influence du christianisme social, il fonde et gère une mutuelle et un syndicat agricoles dans son village et dans les alentours. A la fin de sa vie, il prend même des responsabilités départementales dans la mutuelle et passe le diplôme de géomètre-expert par correspondance, ce qui à l’époque, signifiait pour beaucoup qu’il avait acquis une forme de notabilité. Ce père, malheureusement, tu ne le connaîtras guère, puisqu’il devait décéder des séquelles d’une blessure de la guerre de 1914, alors que tu allais sur tes 8 ans ; sa longue maladie et sa disparition prématurée te privaient d’un pôle d’identification paternel fort, au point que tu disais avoir été surtout élevé dans le milieu des femmes, parmi ta mère, tes soeurs, ta tante, ta grand-mère et avoir souffert de l’absence de référence masculine, que n’a pu réellement remplacer la présence intermittente de tes deux frères aînés.

Ta mère, cadette de deux soeurs, est une femme très active, instruite, possédant le brevet supérieur (ce qui était rare à l’époque), curieuse de l’actualité, issue d’une famille de propriétaires possédant des biens. Organiste habituelle de l’église de Grièges, c’est elle qui t’enseignera plus tard le piano et te transmettra le goût du chant et de la musique qui te seront fort utiles. Elle a aussi une formation d’infirmière et donne quelques soins dans le village. Son courage, sa détermination, son abnégation quand il a fallu élever seule ses 6 enfants t’ont frappé et marqué pour toujours.

Marius et Mathilde ont beaucoup d’autorité sur leurs enfants, se font vouvoyer par eux, et très impliqués dans la vie de la paroisse, les éduquent dans la tradition catholique de l’époque, mais avec une certaine ouverture d’esprit, puisque ta mère dans les années soixante ira jusqu’à prendre la défense des prêtres ouvriers dans un courrier à son évêque.

Mais c’est difficile d’être le septième enfant né en dix ans dans cette famille rurale, qui plus est avec une mère connaissant de grandes difficultés à marcher. Et dans les premières semaines qui ont suivi ta naissance intervenue le 4 mars 1928 à la maternité de Macon, tes parents te confient à une nourrice de Pont-de-Veyle, madame Berthier, auprès de laquelle tu vivras donc le début de ta vie, en compagnie d’un autre nourrisson que tu appelleras ta soeur de lait. Première coupure.

Tu réintègres le foyer familial. Après l’école maternelle, puis l’école primaire publique pendant laquelle tu vis le décès de ton père, mais où tu profites des copains de village, tu pars en internat au petit séminaire de Meximieux en octobre 1939, à 11 ans. Un choix maternel plutôt motivé par un accès gratuit à des études et par l’exemple du frère aîné. C’est dur à cet âge de partir pendant un trimestre complet sans revoir les tiens. Deuxième coupure.

Tu passes la guerre au petit séminaire, endurant les privations et le froid, malgré les colis envoyés par la famille ; finalement tu continues jusqu’au bac et entre au grand séminaire, à Belley déjà. Au terme de la première année d’étude supérieure, te voilà propulsé au service militaire, à 21 ans, en occupation en Allemagne. Période d’une année que tu as mal supportée, malade et mal soigné. Troisième coupure.

A ton retour, tu réintègres le Grand séminaire, deviens sous-diacre en 1952 et tu recevras l’ordination sacerdotale dans cette même cathédrale de Belley où nous sommes aujourd’hui, à l’âge de 25 ans, le 29 mai 1953, cela fera demain exactement 66 ans demain… Ta première nomination sera celle de vicaire à Belley ; puis tu enchaîneras un nombre de postes assez impressionnant en 13 années : aumônier du collège St-Louis de Bourg, de l’Action Catholique Générale des Femmes, de la JOC, de la Croisade eucharistique, de l’Union sportive catholique, des enseignants chrétiens, de l’ACE, des colonies de vacances, autant de nominations plus subies que choisies, qui te laissent souvent un sentiment amer de ne pas être bien à ta place.

Comme tu le disais toi-même tu connus ton « chemin de Damas » à 39 ans, le 26 février 1967 : d’abord un terrible accident automobile vers Pont-d’Ain, qui t’a laissé dans un état physique très précaire et t’a plongé dans une dépression que tu es allé soigner à Nancy auprès de ton frère Marc. Puis une nomination dans une activité réduite comme aumônier d’un sanatorium Mangini à Hauteville qui accueillait les femmes des corons du Nord atteintes pas la silicose et quelques autres femmes par la tuberculose.
Je te cite : « Le vrai choc, c’est là qu’il se produisit. Je rencontrais enfin le monde que j’attendais depuis longtemps sans le savoir, un monde auquel j’étais préparé depuis mon enfance, avec des gens marqués par leur positions dans la société, dépendants, écrasés par la société : des femmes et filles de mineurs, des religieuses infirmières corvéables 24 H sur 24… Je me suis senti chez moi, sans forcer mon talent ; j’ai écouté à en perdre les oreilles. Avec cette expérience, j’avais retrouvé mes racines dans ce monde pourtant inconnu et après un intermède comme curé d’Artemare, je pus répondre à l’appel d’ouvriers chrétiens de Belley qui demandaient un prêtre pour leur milieu. »

Prêtre ouvrier depuis 1972, avec l’assentiment de ta hiérarchie, te voilà livreur de charbon et de boisson, massicoteur dans une imprimerie, ouvrier chez Le Tanneur, syndicaliste, travaillant pour les prud’hommes et les associations d’aide aux consommateurs. Les habitants de la région de Belley et tes confrères en parleront mieux que nous qui ne t’avons pas côtoyé au quotidien durant les cinquante années de ce que tu ressentais comme ta « vraie vie ». Tu choisis donc la vie au coeur des cités, pour vivre vraiment le message de fraternité, de paix et de partage ; aide aux devoirs des jeunes, alphabétisation, entraides multiples. Pour beaucoup tu seras le grand frère, toi qui t’es toujours vécu comme le petit frère. Paradoxe. Modestie. Puis tu as quitté ton appartement haut perché du clos Morcel pour la maison de retraite il y a quelques mois, jusqu’à ce jeudi.

Une vie bien remplie, de 91 ans, qu’il était impossible de résumer en si peu de temps tant elle fut consistante, marquée par une grande intégrité et dont tu as tiré quelques enseignements que tu as livrés dans un texte testamentaire écrit en 2017 : « On a la vie devant soi, elle n’est pas préfabriquée par un autre, Dieu ou le Destin. Le choix de notre route est une réponse à un ensemble de suggestions, d’appels qui viennent du monde où l’on se reconnaît. Ce monde nous est indiqué confusément, dès le sein de notre mère, par la place qui nous est faite dans la société, dans une famille, dans un milieu, La route se précise à mesure, par étapes, par des évènements qui permettent de faire le point pour aller plus loin. »

Cher oncle Bernard, tu as franchi une nouvelle étape ; ta route a rejoint le Ciel, ton Dieu. Nous te souhaitons de tout cœur d’y trouver la Paix et le Ressourcement.