Homélie de la messe chrismale — Diocèse de Belley-Ars

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Homélie de la messe chrismale

Messe chrismale en la co-cathédrale de Bourg-en-Bresse, Mardi 12 avril 2022

Frères et sœurs, pourquoi désignons-nous notre célébration de ce soir comme « messe chrismale » ? L’adjectif « chrismale » évoque le nom de « Christ ». De fait, la messe chrismale nous renvoie à la personne de Jésus en tant qu’il est « le Christ », c’est-à-dire, si l’on traduit ce mot grec en français, « celui qui a reçu l’onction ». Imaginez une onction d’huile, telle qu’on la pratique alors dans la liturgie juive : de l’huile répandue abondamment et étalée généreusement, pour imprégner celui qu’elle touche. Dans la Bible, l’huile signifie la bénédiction divine. Elle est une marque d’honneur et de joie. Comme l’huile douce et odoriférante coule sur une personne, Dieu bénit, couvre et pénètre de son amour celui qui en est marqué. Souvent, l’huile marque l’élection divine. L’huile répandue est alors le signe extérieur que l’Esprit Saint investit une personne et la consacre, c’est-à-dire la réserve et la destine à une mission particulière dans le monde.

Bien sûr, nous reconnaissons en Jésus celui sur qui repose en plénitude l’Esprit Saint. Il est le Fils bien-aimé en qui le Père déverse constamment la totalité de son amour. Il est aussi l’Elu par excellence, celui qui est consacré et envoyé dans le monde pour révéler le Père et dévoiler son dessein bienveillant et miséricordieux sur les hommes. Jésus, dont l’humanité est totalement investie par le don du Saint-Esprit, est consacré et envoyé dans le monde pour proclamer la Bonne Nouvelle, pour la faire connaître à tous.

Nous reconnaissons en Jésus le serviteur décrit par le prophète Isaïe dans la 1° lecture. L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé annoncer la Bonne Nouvelle aux humbles… L’évangile nous rapporte que Jésus lui-même s’est reconnu et identifié dans cette description faite par le prophète Isaïe, puisque, lorsqu’il inaugure son ministère public en Galilée, un jour de sabbat, dans la synagogue de Nazareth, alors qu’il est amené à proclamer ce passage, Jésus déclare solennellement : Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre. Autrement dit, Jésus se donne à reconnaître comme le Serviteur de Dieu venu annoncer la Bonne Nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur, et un jour de vengeance pour notre Dieu, consoler tous ceux qui sont en deuil…

Jésus est donc cet envoyé particulier qui vient accomplir aujourd’hui la mission confiée par le Père. Vous constaterez que le fruit de sa mission, d’après la prophétie d’Isaïe, c’est non seulement le salut, le renouveau, la joie, les honneurs, pour tous ceux qui accueillent le Christ. Mais la conséquence de cette mission, c’est également que tous ceux qui accueillent le Christ deviennent les prêtres du Seigneur et les servants de notre Dieu, qui reçoivent la promesse d’une alliance éternelle et d’une descendance bénie. Pour reprendre les termes de la 2° lecture (le livre de l’Apocalypse), le Christ a fait de nous un royaume et des prêtres pour son Dieu et Père. Oui, le Christ, celui sur qui repose l’Esprit Saint en plénitude, a fait de nous un peuple de rois et de prêtres.

C’est ce que met en valeur le Concile Vatican II (Presbyterorum ordinis, n° 2), lorsqu’il parle du sacerdoce commun des fidèles. Le Seigneur Jésus, que le Père a sanctifié et envoyé dans le monde (Jn 10, 36) fait participer tout son corps mystique à l’onction de l’Esprit qu’il a reçue : en lui, tous les chrétiens deviennent un sacerdoce saint et royal, offrant des sacrifices spirituels à Dieu par Jésus-Christ, et proclament les hauts-faits de celui qui les a appelés des ténèbres à son admirable lumière. (Cf. I Pi 2, 5 et 9).

Mais, dans l’Evangile, vous avez entendu Jésus déclarer que c’est aujourd’hui que s’accomplit la prophétie d’Isaïe. Cet aujourd’hui n’est pas seulement celui d’il y a 2000 ans, c’est notre présent. C’est maintenant, en effet, que Jésus vivant réalise sa mission à notre profit. C’est aujourd’hui, c’est maintenant, que nous sommes à la fois sauvés, libérés et que nous sommes constitués peuple de rois et de prêtres. Mais comment cela se réalise-t-il ? Comment Jésus-Christ nous communique-t-il ce don de l’Esprit Saint qui libère et sanctifie, qui console et consacre, qui illumine et envoie en mission ?

Vous le savez, dans son immense amour pour nous, le Jeudi saint, Jésus a institué le sacerdoce ministériel en même temps qu’il instituait l’Eucharistie. C’est-à-dire qu’il a associé des hommes qu’il a chargés d’agir en son nom :Vous ferez cela en mémoire de moi. Il leur a donné de participer à son autorité de service par laquelle lui-même conduit, sanctifie et gouverne son corps qui est l’Eglise. C’est pourquoi à l’occasion de cette messe chrismale nous rendons grâces à Dieu pour les prêtres que le Seigneur donne à notre Eglise diocésaine.

Rares sont les occasions où la majorité des prêtres du diocèse sont rassemblés autour de l’évêque pour concélébrer la messe, en présence d’une grande partie des fidèles laïcs venus de toutes les parties du diocèse. Cette célébration manifeste à la fois l’union étroite des prêtres autour de l’évêque et l’unité de l’Eglise particulière, autour d’un successeur d’Apôtre. Vous le savez, les prêtres sont les premiers coopérateurs de l’évêque. Ensemble, avec lui, ils manifestent le Christ constamment présent à son Eglise. Ensemble ils manifestent le Christ souverain prêtre agissant en notre faveur et donnant sa vie en sacrifice offert pour que nous recevions la vie divine.

Je profite de cette assemblée diocésaine pour remercier vivement et chaleureusement, en votre nom à tous, les prêtres qui, en réponse à un appel de Dieu, se sont généreusement donnés au Seigneur et se dévouent quotidiennement à votre service ! Comme vous le savez, les circonstances dans lesquelles nous vivons actuellement sont particulièrement éprouvantes pour eux. La crise sanitaire, le scandale provoqué par quelques-uns et rejaillissant sur tous, la baisse des vocations et la charge plus lourde qui leur incombe de ce fait ; la difficulté de la collaboration avec certains laïcs qui se situent en concurrence, et surtout le changement culturel profond dans lequel nous sommes entrés et qui bouleverse totalement notre manière de vivre la mission… Tout cela fait que leur vie et leur ministère sont parfois durs à vivre. 

Les prêtres, unis autour de leur évêque, ont reçu une belle et grande mission : Ils ont à conduire chacun au Christ, souverain prêtre, unique source de Salut. Ils ont à répandre et communiquer le don de l’Esprit Saint, par l’annonce de la Parole de Dieu et la célébration des sacrements.  Dans quelques instants les prêtres seront appelés à renouveler les engagements qu’ils ont librement et généreusement prononcés le jour de leur ordination pour l’amour du Christ et le service de l’Eglise. Ils rediront leur disponibilité à vivre toujours plus intimement unis au Seigneur Jésus. Ils s’engageront à agir avec toujours plus de désintéressement et de charité, comme de fidèles intendants du trésor que Dieu leur confie pour votre propre croissance.

Et vous-mêmes, vous serez invités à la prière pour vos prêtres et votre évêque, pour que nous demeurions fidèles à la mission reçue et que nous conformions toujours davantage notre vie à l’appel reçu du Seigneur. Bien sûr, cette prière ne doit pas être ponctuelle, limitée à ce soir, mais elle doit être quotidienne. Vos prêtres comptent sur vous. Ils doivent se sentir portés par votre prière, et stimulés par votre estime. Et puis cette prière doit déboucher sur une charité concrète à leur égard. Veillez à la manière dont vous parlez d’eux et de leur ministère ! Que votre parole soit toujours bonne et constructive ! Ayez aussi le souci de les accueillir et de les entourer.

Je pense notamment aux prêtres qui, dans une belle obéissance, consentent à recevoir une nouvelle mission en septembre prochain. Aidez-les en consentant vous-même au changement et en acceptant que le nouveau curé ne ressemble pas au précédant. Allez à l’essentiel ! Sollicitez chacun pour le meilleur de ce qu’il a à vous donner et disposez-vous à recevoir les richesses nouvelles que Dieu vous destine à travers un nouveau pasteur. Veillez à les décharger d’un certain nombre de tâches matérielles. Soutenez-les quand ils sont éprouvés. Reprenez-les fraternellement aussi quand ils en ont besoin ! Priez avec eux la Liturgie des Heures, partagez l’Evangile avec eux ! Entraînez-les à vivre la charité très concrète avec vous au service des plus petits. Bref, aidez-les à être d’abord des disciples-missionnaires, avec vous ! Réalisez au passage combien c’est éprouvant pour un homme qui a consacré toute sa personne et sa vie à l’Evangile d’être souvent confronté à des demandes religieuses en grand décalage avec la foi chrétienne.

Et puis, en cette messe chrismale, je vais procéder à la bénédiction des huiles. Ces huiles, ce sont celles qui serviront toute l’année durant dans toutes les paroisses du diocèse. Autrement dit, nous sommes maintenant à la source qui va alimenter la vie chrétienne des Pays de l’Ain durant les douze mois à venir. C’est le Père miséricordieux qui va répandre sa vie par le Christ, sur qui repose la plénitude de l’Esprit Saint. C’est le Père miséricordieux qui va nous communiquer le don de l’Esprit Saint qui sanctifie et vivifie. Par l’action de ses ministres ordonnés, Jésus-Christ sera présent pour « annoncer la Bonne Nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par le Seigneur, et un jour de vengeance pour notre Dieu, consoler tous ceux qui sont en deuil… »

Il le fera par le ministère de l’évêque et des prêtres qui célébreront baptême, confirmation, onction des malades, onction des catéchumènes… Le saint-Chrême servira pour l’ordination des évêques et des prêtres, qui, configurés au Christ, et agissant en son nom, vous nourriront de l’Eucharistie et vous dispenseront le pardon de Dieu. Le saint Chrême servira aussi pour le baptême dans la nuit de Pâques d’une trentaine d’adultes et de 11 adolescents, puis de nombreux enfants, au fil des mois à venir. Il servira enfin pour la confirmation d’environ 350 adultes, enfants et adolescents. L’onction de l’huile des malades apportera soutien et réconfort aux personnes qui solliciteront l’aide du Seigneur lors d’une grave épreuve de santé ou à l’approche de la mort. L’huile des catéchumènes pénétrera les futurs baptisés qui recevront ainsi la force dont ils ont besoin pour s’engager dans le combat de la foi.

Ainsi, jour après jour, mois après mois, par le ministère des prêtres et la célébration des sacrements, le Christ lui-même vous nourrira, vous fera grandir et vous rendra aptes à exercer votre mission propre en ce monde. Cette mission, le sacerdoce commun des fidèles, est triple : mission sacerdotale en offrant votre personne tout entière en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu (Rm 12, 1). Mission royale en vous mettant au service les uns des autres, à l’image du Christ qui s’est fait serviteur de tous. Mission prophétique en proclamant l’Evangile de l’Espérance et en annonçant la Miséricorde du Père.

Ainsi, jour après jour, mois après mois, le Christ lui-même vous rendra aptes à exercer cette triple mission en ce monde. Car, les uns et les autres, ne l’oublions surtout pas, nous sommes choisis et envoyés à tous nos frères humains. Nous ne sommes pas destinés à construire une société à part, un microcosme pour vivre dans l’entre soi. Mais nous sommes destinés à être serviteurs du monde que Dieu aime et pour lequel le Christ donne sa vie.                

+ Pascal ROLAND