Ouverture du Jubilé de saint Vincent à Châtillon - 25 janvier 2017 — Diocèse de Belley-Ars

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Ouverture du Jubilé de saint Vincent à Châtillon - 25 janvier 2017

Le mercredi 25 janvier 2017 s’est ouverte l’année jubilaire de saint Vincent de Paul à Châtillon-sur-Chalaronne. La date du 25 janvier, fête de la Conversion de saint Paul, est l’anniversaire de la première mission paroissiale menée par Vincent de Paul à Folleville, paroisse du diocèse d’Amiens. C’est pour cette raison que Mgr Olivier Leborgne, évêque d’Amiens, a été invité par Mgr Pascal Roland à présider cette célébration d’ouverture du jubilé.

Une exposition a tout d’abord été inaugurée à l’Hôtel-Dieu de Châtillon, pour présenter Vincent de Paul et ses héritiers qui oeuvrent pour les plus fragiles depuis 400 ans.

A 18h15, dans l’église Saint-André-et-saint-Vincent, de nombreux fidèles de la paroisse et du diocèse ont pris par à l’eucharistie, présidée par Mgr Leborgne, et concélébrée par Mgr Roland et une dizaine de prêtres du diocèse.

A la fin de la messe, le P. Dominique Blot, curé du groupement paroissial de Châtillon, a invité Mgr Leborgne à dévoiler la reproduction d’une icône des prêtres lazaristes de Kiev : saint Vincent donnant du pain à un pauvre, dont le visage est celui du Christ lui-même.

 

Homélie de Mgr Leborgne

« Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » Nous entendions il y a quelques instant cette parole posée par celui que Saul ne connaît pas encore, mais qui va se révéler à lui, le Seigneur Jésus.

« Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » C’est en étant terrassé par l’Amour que saint Paul va devenir l’apôtre des nations. Celui qu’il persécute, c’est Jésus. Dieu ne nous aime pas de l’extérieur. Son amour va jusqu’au bout, jusqu’à épouser notre humanité dans sa totalité, dans son entièreté, jusqu’à s’identifier à nous, et tout particulièrement au plus démuni, au plus pauvre, au persécuté.

« Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » C’est en voyant un pauvre terrassé par l’Amour le 24 janvier 1617, c’est en prêchant sur la confession générale à la demande de Mme de Gondi le 25 janvier 1617 que l’abbé Vincent de Paul va progressivement être terrassé par l’amour et se faire, dans l’amour et par amour et pour l’amour, évangélisateur des pauvres.

Alors que l’abbé Vincent de Paul vit un moment de déprime dans son ministère (« je ne catéchisais plus et ne prêchais plus » dira-t-il), il est appelé pour confesser un pauvre. La manière dont ce pauvre va vivre cette confession en témoignant d’une expérience de salut et la réaction de Mme de Gondi vont être décisives dans la vie du futur saint Vincent de Paul. Ce pauvre a été terrassé par l’Amour – il comprend que par la confession il vient de vivre une expérience de Salut, il vient d’être réconcilié avec Dieu et avec lui-même. Vincent de Paul, par cette rencontre et l’injonction de Mme de Gondi de prêcher le lendemain sur la confession générale, va de Folleville à Châtillon, se laisser lui-même terrasser par l’Amour.

 

« Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » Saisi par l’indigence spirituelle des pauvres de son époque, Vincent va devenir évangélisateur des pauvres, tâche qu’il assignera à la congrégation de la Mission. Il aimera faire référence aux paroles de Jésus à la synagogue de Nazareth, reprenant les paroles du prophète Isaïe (Lc 4, 18) : « L’Esprit su Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction : il m’a envoyé proclamer la bonne nouvelle aux pauvres ». Les destinataires premiers, tel qu’Isaïe l’annonce, tel que Jésus le reprend à la synagogue de Nazareth, les destinataires premiers de l’Amour, de la Bonne Nouvelle, sont les pauvres. Vincent de Paul ne cessera de le répéter : « Notre vocation est : Evangelizare pauperibus ». Evangéliser, c’est-à-dire prendre soin de la personne dans son ensemble, jusque dans sa destiné de Salut, tant dans ses dimensions corporelle et sociale que spirituelle. Ce sera sans doute l’aspect marquant de l’expérience que Vincent de Paul vivra à Châtillon. Plus il servira les pauvres, plus il découvrira combien son Seigneur s’identifie à eux. C’est la raison pour laquelle les pauvres deviendront ses maîtres. Non pas qu’ils seraient plus saints ou plus sages que d’autres, mais comme saint Paul a découvert par révélation que ceux qu’il persécutait étaient le Christ, Vincent de Paul découvrira en les servant que les pauvres que nous voulons servir sont le Christ. « Servant les pauvres, on sert Jésus Christ », répètera-t-il souvent aux filles de la Charité. Entendez bien, frères et soeurs : servant les pauvres, ce n’est pas « comme si » on servait Jésus-Christ. Ou on ne sert pas les pauvres parce qu’on aime Jésus-Christ, et qu’Il nous dit de servir les pauvres. Mais « en servant les pauvres, on sert Jésus Christ » Pas de soin spirituel sans soin corporel et social. Pas plus de soin corporel et social sans soin spirituel et visée de Salut. En effet, tout homme ou femme, à commencer par le plus pauvre, est fait pour la joie éternelle et la plénitude de la vie.

 

« Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » « Qui es-tu Seigneur ? » « Je suis Celui que tu persécutes. » Il me semble qu’avec Paul dont nous célébrons la conversion aujourd’hui, et Vincent de Paul, au début de cette année vincentienne, nous pouvons recueillir un certain nombre de leçons. Je voudrais vous en partager trois.

Redécouvrons que, comme le disait saint Vincent, « Les pauvres sont nos maîtres » : ce n’est pas une déclaration affective ou idéologique, c’est une affirmation théologique, que le pape François développera dans la Joie de l’Evangile. Nous avons raison de citer souvent la parabole du jugement dernier en Mt 25 pour fonder notre service des plus démunis : « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait ». Notre Seigneur, celui que nous confessons comme Sauveur, s’identifie aux plus pauvres. Vincent de Paul n’est pas d’abord un humanitaire, au sens moderne du terme – comment ne pas être plein de reconnaissance envers ceux qui s’engagent dans l’humanitaire ? – mais Vincent de Paul se situait autrement. Plus il se donnait à son Seigneur, plus il était donné aux pauvres ; plus il se donnait aux pauvres, plus il faisait l’expérience de son Seigneur. Saint Vincent de Paul dira quelques années après : « Donnez-moi un homme d’oraison, il sera capable de tout. ». Il savait – et nous qui sommes au service des plus pauvres ou qui désirons l’être, il nous faut le redécouvrir – que la plongée en Dieu démultiplie l’action. On ne perd jamais son temps à faire oraison, on en gagne, puisque par l’oraison, on s’ouvre à l’accueil de la puissance de l’Esprit du Ressuscité. Il savait que dans l’oraison se trouvait la clé de la reconnaissance du pauvre dans sa dignité inaliénable. A lui s’identifie le Christ. Le service des pauvres, qui demande rigueur et compétence, ne peut jamais se réduire à des techniques ou des procédures. Ce sont toujours des personnes que l’on rencontre, des personnes engagées dans une histoire sainte, dans une histoire de Salut.

 

Autre leçon : « La bonne nouvelle est annoncée aux pauvres. » C’est Jésus qui reprend le prophète Isaïe, et cette parole du Christ a tant marqué saint Vincent. Avec l’apôtre des nations, Vincent de Paul se voulait évangélisateur. « Allez dans le monde entier proclamer la Bonne Nouvelle à toute la création », c’est l’Evangile que nous avons entendu. Vincent de Paul se voulait évangélisateur. Et pour Vincent, il s’agissait d’abord d’être évangélisateur des pauvres, non pas contre ceux qui seraient moins pauvres. Evangéliser les pauvres, cela veut dire aller partout, surtout là où personne ne va, dans tous les « no man’s land » où figurent l’absence de respect de l’autre, l’injustice, l’indifférence coupable, l’ignorance de Dieu. Précurseur du pape des « périphéries », il ne voulait pour les pauvres rien de moins que le meilleur. Nous ne pouvons pas servir les pauvres sans vouloir pour eux rien de moins que le meilleur. Et pour saint Vincent, il n’y a pas d’autre meilleur que Dieu lui-même. Ne pas avoir cette visée-là dans le service du pauvre, ce n’est pas considérer le pauvre pour ce qu’il est en profondeur. Vincent de Paul avait compris qu’annoncer Dieu à celui dont on ne prend pas soin, dans ses besoins les plus fondamentaux, est une contradiction insupportable. Mais découvrir cela – et ce fut sans doute l’une des expériences majeures de Châtillon – ne lui fera jamais oublier ce meilleur auquel tout homme est promis et qu’il voulait pour les pauvres qu’il servait. Comment ne pas citer ici le pape François dans la joie de l’Evangile (n° 200) : « je veux dire avec douleur que la pire discrimination dont souffrent les pauvres est le manque d’attention spirituelle. L’immense majorité des pauvres a une ouverture particulière à la foi ; ils ont besoin de Dieu et nous ne pouvons pas négliger de leur offrir son amitié, sa bénédiction, sa Parole, la célébration des Sacrements et la proposition d’un chemin de croissance et de maturation dans la foi. L’option préférentielle pour les pauvres doit se traduire principalement par une attention religieuse privilégiée et prioritaire. »

 

Dernière leçon que je voudrais vous partager ce soir. Affirmer ce que je viens de dire, à la lumière de la conversion de saint Paul et de l’expérience de saint Vincent de Paul dont l’étincelle a eu lieu à Folleville il y a 400 ans, affirmer tout cela n’est pas sans conséquence sur notre manière de concevoir l’Evangélisation. Ce n’est pas l’annonce universelle de l’Evangile qui est signe de la présence de Dieu, c’est le fait que cette annonce universelle se réalise par les pauvres (cf. Lc 4,18). « Il m’a envoyé annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres. » Le mouvement indiqué dans l’Evangile part de l’annonce aux pauvres et se prolonge, à partir de là, dans une annonce universelle. En vérité, et me voilà interpellé, peut-être même bousculé comme évêque, si l’Evangile n’est pas d’abord annoncé aux pauvres, alors nous n’annonçons pas le bon Evangile à tous les hommes…

« Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » « Qui es-tu Seigneur ? » « Je suis Celui que tu persécutes.» En cette fête de la conversion de Saint Paul, entrons ensemble dans l’année vincentienne. Que le Seigneur soit béni !

Mgr Olivier Leborgne
Evêque d’Amiens