Une Eglise entraînée dans un mouvement de dépouillement — Diocèse de Belley-Ars

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Une Eglise entraînée dans un mouvement de dépouillement

Homélie pour l’office de la Passion, le Vendredi Saint 2021 en la co-cathédrale Notre-Dame de Bourg-en-Bresse

 

La crise sanitaire dans laquelle nous sommes plongés nous a contraint de simplifier nos liturgies de la Semaine Sainte. Les restrictions pour les rassemblements et le couvre-feu nous ont déjà amenés à modifier les horaires des célébrations du triduum pascal. Ajoutez à cela l’absence de procession le jour des Rameaux ; la célébration de la messe chrismale avec un concours limité de personnes ; l’omission du lavement des pieds le Jeudi Saint ; l’abandon du chemin de croix sur la voie publique le Vendredi Saint et la vénération de la croix sous une forme simplifiée (sans baiser du crucifix) ; le report de la Vigile pascale aux premières heures du dimanche matin, à 6 h 30, sans rassemblement autour du feu pascal. On a donc supprimé bon nombre d’aspects qui peuvent paraître anecdotiques au risque de tomber parfois plus ou moins dans le folklore (je pense à un village, où il y a une belle représentation du chemin de croix dans les rues… mais dont les participants ne se rendent pas aux offices religieux, malgré les sollicitations du curé !). En tous cas, nos liturgies simplifiées nous conduisent à aller à l’essentiel. 

 

Mais il faut aussi resituer cette situation dans un contexte plus global. Celle-ci s’inscrit en effet dans un contexte de dépouillement général. Au-delà des circonstances particulières de la pandémie, qui n’a fait qu’accélérer le mouvement, nous vivons en effet depuis plusieurs décennies une situation que d’aucuns pourraient qualifier de décroissance. Celle-ci se caractérise par la perte d’effectifs (baisse du nombre de baptêmes, mariages, enfants catéchisés, messalisants, ordinations, vœux religieux) ; la perte de respectabilité en raison de scandales (quand ont été mis au jour les actes de pédophilie commis par certains prêtres et religieux, qui ont abîmé des enfants de Dieu et ainsi  terni l’image de l’Eglise) ; la perte de moyens financiers, (nos ressources allant en diminuant, du fait du moins grand nombre de donateurs) ; la perte de visibilité (fermetures de maisons religieuses, ventes d’immeubles et parfois d’églises récentes dans certains diocèses) ; enfin, l’effacement de l’influence morale et politique (par exemple, on ne tient pas compte de l’avis de l’Eglise catholique dans les projets de lois bioéthique ou l’accueil des migrants)

 

Face à cette réalité, on peut se laisser aller à la désespérance, si l’on raisonne uniquement de manière humaine, avec les seuls critères du monde : les critères de nombre, d’image, de réussite sociale, d’influence politique… Mais il convient plutôt de nous interroger : qu’est-ce que Dieu veut nous dire à travers ce qu’il nous est donné de vivre ? Force est alors de constater que nous sommes entraînés dans un mouvement de dépouillement qui nous centre résolument sur le mystère de la croix du Christ. Nous avions sans doute perdu de vue que l’Eglise est l’Epouse du Christ. A ce titre, elle doit donc communier à ce que vit le Christ. Elle doit être configurée au mystère du Christ dans sa Passion, afin d’avoir part à sa résurrection. 

 

Nous avions sans doute oublié également que l’Eglise n’est pas identifiable au Royaume de Dieu et qu’elle ne constitue pas la société parfaite. Nous avions certainement oublié que nous sommes d’abord citoyens du ciel. Enfants d’Abraham, nous sommes un peuple de nomades en marche vers notre patrie du ciel. Nous sommes fondamentalement des pèlerins étrangers sur cette terre. Pris par le tourbillon de nos sociétés prônant le bien-être, et organisant toutes choses autour de la consommation et des loisirs, nous avions plus ou moins cédé à l’attrait des nouvelles idoles de l’individualisme, du matérialisme, du confort, de la sécurité, de la santé… au lieu de suivre le Christ pauvre, chaste et obéissant. 

 

Mais entraînés dans un mouvement de dépouillement, nous voici providentiellement rapprochés des plus pauvres, des plus petits, de tous ceux et celles auxquels le Fils de Dieu s’est identifié, et auxquels nous sommes envoyés en priorité.

 

Bienheureuses circonstances, qui nous font donc descendre de notre piédestal, qui nous obligent à choisir et décider si nous voulons véritablement appartenir au Christ ; à manifester clairement si nous voulons vraiment consacrer notre vie à son service. Notre vocation est d’être témoins de ce qui est éternel, témoins de l’amour divin qui nous est donné en partage et que nous sommes chargés de communiquer à nos semblables. 

 

Aujourd’hui, choisissons donc résolument de suivre le Christ crucifié, de nous attacher plus étroitement à lui ; de suivre l’envoyé du Père qui a été méprisé, abandonné, humilié, maltraité, jugé et condamné de manière inique, rejeté, compté pour rien, finalement crucifié comme un malfaiteur et retranché de la terre des vivants ; alors que c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé ; alors qu’il portait le péché des multitudes et intercédait pour les pécheurs. 

 

Comme l’enseigne la lettre aux hébreux, « Bien qu’il soit le Fils, il apprit par ses souffrances l’obéissance et, conduit à sa perfection, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissant la cause du salut éternel. » Oui, obéissons lui plus étroitement ! Soyons les témoins de celui qui nous apporte le salut véritable en nous libérant de tout ce qui nous tient en esclavage et nous conduit à notre perte commune. 

 

+ Pascal ROLAND