Ordination de Daniel Lefèvre : « Sa grâce me suffit » — Diocèse de Belley-Ars

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Ordination de Daniel Lefèvre : « Sa grâce me suffit »

Notes de l’homélie pour l’ordination presbytérale de Daniel LEFEVRE en la Cathédrale de Belley, dimanche 27 juin 2021
Lectures : Nombres 11, 11-25 ; Ps 115 ; 2 Corinthiens 4, 1-7 ; Jean 21, 15-17

« L’amour seul transforme une vie ». Tel est le témoignage que Daniel a donné aux écoliers et aux collégiens qu’il a fréquentés cette année à l’institution saint Joseph d’Oyonnax. Daniel a souhaité que les jeunes rencontrés retiennent cette vérité capitale.  Il le leur a fait inscrire, en rouge et soulignée, dans leurs cahiers. Si Daniel peut témoigner de cette vérité avec enthousiasme, c’est parce qu’il l’a lui-même expérimentée. 

 

C’est d’abord dans sa famille qu’il a pu faire l’expérience concrète de l’amour. Là, il a été aimé et il a appris à aimer, à se donner. Dans sa famille, Daniel a aussi appris à aller à la source de l’amour, car on lui a offert la chance de connaître et aimer le Christ, qui nous révèle le prix infini que nous avons aux yeux de Dieu. Par sa vie donnée, le Christ nous révèle en effet que nous sommes nés de l’amour trinitaire et que notre vocation d’enfants de Dieu est d’aimer, comme Dieu nous aime : « Voici comment nous avons reconnu l’amour : lui, Jésus, a donné sa vie pour nous. Nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères », enseigne l’apôtre saint Jean (1 Jean 3, 16).

 

Et puis tout son cheminement spirituel a amené Daniel à prendre davantage conscience de l’amour gratuit et inconditionnel de Dieu. L’amour de Dieu, c’est plus qu’un forfait illimité ! Cela dépasse tout ce que nous pouvons imaginer ou même espérer. Nous n’aurons jamais fini de nous en émerveiller. Lorsqu’on rencontre véritablement cet amour qui nous précède, nous enveloppe, nous rattrape à chaque instant, nous sauve de la mort, alors, on ne peut que vouloir y répondre de tout son être. On ne peut que chercher à entrer toujours davantage dans sa dynamique. 

 

D’une part, on ne peut qu’être reconnaissant vis-à-vis de Dieu ; et exprimer sa gratitude en chantant constamment la louange de Dieu. D’autre part, on ne peut qu’offrir sa peine à l’annonce de la Bonne Nouvelle ; et s’engager à faire tout son possible pour répandre l’amour de Dieu dans le monde que Dieu aime et qui, bien souvent, le méconnaît. Daniel est habité par cette passion à témoigner du Christ. Il a écrit : « la véritable flamme qui m’a souvent animé, passionné dans mes relations avec les autres, fut de leur faire découvrir celui que mon cœur aime »

 

Dès son plus jeune âge, Daniel a entretenu une relation intime avec le Christ, et il a perçu l’appel à le suivre en devenant prêtre. A cet appel, il a très tôt donné une réponse positive, sans hésitation. C’était pour lui une véritable certitude : il serait prêtre. Alors qu’il était adolescent, lorsque quelqu’un lui a demandé s’il ne se posait pas la question de devenir prêtre, il a répondu avec assurance : « Je ne me pose pas de questions, puisque je connais déjà la réponse ». Cette réponse avait certes besoin d’être mûrie. Mais la certitude était là, bien enracinée : il trouverait son bonheur en étant ministre de la miséricorde divine.

 

Chemin faisant, Daniel a pris la mesure de sa fragilité et de ses limites humaines, mais aujourd’hui il ne craint pas cette fragilité, car il a bien intégré ce que disait saint Paul à l’instant :  nous ne sommes que des vases d’argiles contenant le trésor du Christ. « Ce que nous proclamons, ce n’est pas nous-mêmes ; c’est ceci : Jésus Christ est le Seigneur ; et nous sommes vos serviteurs, à cause de Jésus ». Nos limites et notre fragilité ne constituent pas un handicap, bien au contraire, puisqu’avec elles, il n’y a pas d’ambiguïté possible :  on voit bien que la puissance extraordinaire de l’Evangile appartient à Dieu seul et ne vient pas de nous !  

 

L’humble accueil de nos pauvretés a pour bénéfice de nous rappeler à chaque instant que si nous pouvons être ministres de la miséricorde divine auprès de nos frères c’est parce que nous en sommes les premiers bénéficiaires. Dans l’évangile, vous venez de constater que si Jésus a choisi Simon-Pierre pour être le responsable de son troupeau, et devenir le rocher destiné à être le fondement de l’Eglise, ce n’est certes pas parce que celui-ci aurait eu des qualités hors du commun pour assurer le gouvernement de son Eglise ; mais c’est précisément parce qu’il a fait l’expérience du salut !

 

Voyez avec quelle délicatesse Jésus interroge Simon- Pierre en decrescendo, en diminuant progressivement l’intensité de sa demande. Il commence par demander : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu vraiment, plus que ceux-ci ? ». Puis, il baisse d’un cran : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu vraiment ? ». Et enfin il se contente de demander : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? ». Précisons qu’en grec le verbe employé lors de cette troisième question n’est pas le même que dans la première. Il n’est pas aussi fort. On pourrait le traduire : as-tu de l’affection pour moi ? 

 

Cette triple demande de Jésus fait écho au triple reniement de Simon-Pierre, lors de la Passion. Elle remet ce dernier devant la vérité de sa misère, mais sans l’écraser. Elle resitue en vérité celui qui avait osé se situer à part des autres disciples, dans une assurance prétentieuse, affirmant de façon présomptueuse : « Même si tous viennent à tomber, moi je ne tomberai pas » (…) « Même si je dois mourir avec toi, je ne te renierai pas » (Marc 14, 29 et 31).

 

Lorsque nous sommes choisis par Dieu pour une mission au service des autres, ce n’est pas parce que nous serions meilleurs et que nous mériterions la responsabilité confiée. Mais c’est pour être témoins de la victoire de l’amour, pour témoigner de ce que nous avons reçu nous-mêmes par pure grâce. C’est d’ailleurs ce que nous signifie la devise de l’actuel successeur de Pierre, le pape François : « Miserando atque eligendo », formule que nous pourrions traduire : choisi parce que pardonné.

 

La première chose qui est demandée à Daniel, comme à tout ministre ordonné, c’est donc de demeurer proche de Jésus, de manière humble et confiante ; car lui seul, est le Bon Pasteur, qui a donné sa vie pour nous. C’est en lui seul que notre ministère peut connaître une véritable fécondité : « Demeurez-en moi, comme moi en vous. (…) Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jean 15, 4…5). Il s’agit donc de prendre du temps pour l’écouter assidument, accueillir inlassablement sa miséricorde, et lui dire, humblement, de tout son cœur, comme l’apôtre Pierre : « Seigneur, toi tu sais tout : tu sais bien que je t’aime ».

 

La deuxième chose qui est exigée de Daniel, c’est de demeurer proche des autres, car on n’est pas prêtre tout seul, de la même manière qu’on n’est pas chrétien tout seul. La grande tentation est d’œuvrer comme si l’on était un artisan à son compte personnel. Le grand défi est donc celui de la collaboration fraternelle. La première  lecture nous a montré tout à l’heure comment le Seigneur, dans sa bonté, a fait reposer son Esprit sur 70 anciens, afin de donner à Moïse des frères qui porteraient la charge avec lui.  

 

Il y a d’abord la collaboration entre prêtres, en communion avec l’évêque. Un prêtre ne doit jamais oublier ce que soulignait le pape saint Jean-Paul II dans son exhortation sur la formation des prêtres, Pastores dabo vobis : « Le ministère ordonné est radicalement de nature communautaire et ne peut être rempli que comme œuvre collective » (Jean-Paul II, PDV n° 17). Cela implique notamment de prendre avis, de se concerter, de communiquer, de coordonner, de mutualiser, de partager et de rendre compte… 

 

Ensuite, il y a la collaboration avec les fidèles laïcs. Ceux-ci ne sont ni des sujets, ni des rivaux, mais des frères habités par le même Esprit Saint, partageant la même responsabilité missionnaire, au titre du baptême. Cela implique de ne pas instrumentaliser la responsabilité pastorale et le pouvoir sacramentel pour jouer au petit chef. Car dans l’Eglise l’autorité est toujours un service, à la suite du Christ Bon Pasteur, qui donne sa vie pour ses brebis. Il s’agit donc de travailler en bonne intelligence avec tous les baptisés, dans le respect des responsabilités spécifiques de chacun, à l’écoute de ce que l’Esprit Saint nous donne les uns aux autres.

 

La troisième exigence est la proximité avec les personnes les plus pauvres, puisque Jésus manifeste un amour préférentiel pour les personnes qui souffrent de quelque manière, et s’identifie même à ces personnes. On se sent bien impuissant face aux multiples situations de misère du monde : pauvretés économique, sociale, spirituelle… Mais on se doit, d’une part, de manifester la proximité du Christ aux plus petits ; d’autre part, d’accueillir la présence du Christ dans les personnes éprouvées. Daniel a fait cette expérience avec les enfants des rues de Manille. C’est quelque chose qui l’a profondément marqué. Ainsi il aidera ceux qu’il rencontrera à ne pas oublier la diaconie de l’Eglise. Et il leur montrera la joie de vivre l’Evangile avec les plus petits.

 

Je ne voudrais pas terminer sans remercier les prêtres, qui chaque jour assurent leur ministère avec fidélité. Vous le savez, en ce mois de juin, c’est pour beaucoup d’entre eux l’anniversaire d’ordination. C’est donc l’occasion de raviver le don reçu et de retrouver plus profondément la grâce de servir le Christ et son Eglise. Je pense tout particulièrement à ceux qui sont ici présents et fêtent aujourd’hui même l’anniversaire de leur ordination. 

 

Et puis je termine en adressant un appel spécifique aux jeunes ici présents. Je me souviens avoir ordonné prêtre un jeune qui avait pris la décision d’entrer au séminaire le jour de l’ordination d’un aîné à laquelle il participait. Puisse l’ordination de Daniel constituer un appel et inspirer à l’un ou l’autre la ferme décision de suivre son exemple dans ce beau et irremplaçable service du Christ et de son Eglise !

 

 + Pascal ROLAND