Le Christ nous donne la vie — Diocèse de Belley-Ars

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Le Christ nous donne la vie

Homélie du Jeudi Saint 2018 à la Cathédrale de Belley

« Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne », vient de nous enseigner saint Paul dans la deuxième lecture. Avez-vous bien réalisé que chaque fois que nous célébrons l’Eucharistie et que nous communions au corps et au sang du Christ, nous proclamons la mort de Jésus ! N’est-ce pas étrange et singulier ? Alors qu’habituellement notre société fait tout pour occulter et faire oublier la réalité de la mort, voici que nous, chrétiens, au contraire, nous mettons une mort en avant : la mort violente de Jésus-Christ sur une croix.

 

Pour comprendre la raison de cette étonnante mise en valeur de la mort particulière de Jésus, nous sommes aujourd’hui éclairés par deux récits bibliques qui encadrent le récit de l’institution de l’Eucharistie transmis par saint Paul. D’une part, le récit du rituel de la pâque juive, que nous avons entendu en première lecture. D’autre part, le récit du lavement des pieds, dans l’évangile proclamé à l’instant.

 

Pour commencer, avez-vous remarqué que lorsque Jésus célèbre la dernière Cène avec ses disciples, ce n’est pas n’importe quel jour, mais précisément au moment où l’on célèbre la pâque juive ! C’est-à-dire au moment même où le peuple juif commence une nouvelle année en faisant référence à l’événement fondateur de son histoire, la sortie d’Egypte. Ce ne certes pas par hasard que Jésus donne sa vie à ce moment-là de l’année et pas à un autre !

 

Comme cela nous a été enseigné dans la première lecture, la pâque juive commémore la sortie d’Egypte et la mise en route du peuple sauvé vers la terre promise. En célébrant cette fête, le peuple juif se souvient que Dieu est libérateur et qu’en dehors de lui il n’y a pas de véritable liberté.

 

Selon les prescriptions du livre de l’Exode, on se réunit autour d’un agneau, un agneau sans défaut, qu’on immole au coucher du soleil. L’élément essentiel, c’est le sang de cet agneau, dont on marque les montants et les linteaux des portes. Car les personnes habitant les maisons marquées par ce sang sont épargnées : elles échappent au fléau de la mort.

 

Et puis prêtez attention au contexte : on mange en toute hâte, la ceinture aux reins, les sandales aux pieds et le bâton à la main. C’est-à-dire sans s’attarder et avec tout l’équipement du pèlerin. Autrement dit, celui qui participe à la pâque est fils d’Abraham. Il est prêt à prendre la route. Il ne va pas s’installer ici-bas, parce que sa patrie est ailleurs.

 

Qu’est-ce qui est en jeu dans cette pâque juive ? C’est rien moins que le mystère de la liberté humaine. En célébrant la pâque juive, on manifeste que Dieu est le libérateur et que sans lui on est esclave. Le pharaon et l’Egypte qu’on abandonne symbolisent un monde qui prétend se construire sans Dieu ; un monde qui asservit l’homme et ne peut que le rendre malheureux. En célébrant la pâque, le peuple juif se souvient donc qu’il y a un type d’existence qui conduit à la mort et que c’est la relation à Dieu qui fait échapper à cet univers mortel.

 

Mais avez-vous noté qu’il y a une nouveauté dans le récit de la dernière cène ? Lorsque saint Paul rapporte la tradition qu’il a reçue, l’attention n’est plus focalisée sur l’agneau. Vous observerez qu’il n’en parle pas. Tout simplement parce que l’agneau sans défaut est là en la personne de Jésus. Désormais, c’est lui, Jésus, qui apporte le salut ! C’est lui l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde.

 

Il n’est plus question de sang sur les portes. Tout simplement parce que le sang de l’agneau, c’est le sang du Christ ; son sang qui sera versé sur la croix et qui nous vaut la délivrance. Autrement dit, tout ce qu’a vécu le peuple d’Israël annonçait le Christ et trouve son accomplissement dans la mort du Christ sur la croix.

 

Si nous examinons maintenant le deuxième volet qui éclaire la mort de Jésus, le récit du lavement des pieds, Jésus nous instruit lui-même sur le sens et les implications de sa mort, qu’il anticipe au travers de ce comportement inattendu. Nous le voyons paisiblement se lever de table, et accomplir calmement et avec détermination un certain nombre de gestes : déposer son vêtement, prendre un linge qu’il se noue autour de la ceinture. Puis verser de l’eau dans un bassin, laver les pieds des disciples et les essuyer avec le linge qu’il porte à la ceinture.

 

Autrement dit, Jésus prend la dernière place. Lui, le Maître et Seigneur, prend la place de l’esclave. Lui, le Fils de Dieu, se met à genoux devant ses créatures et accomplit l’humble tâche de leur laver les pieds. Par ce geste, Jésus anticipe et explique le sens de sa mort sur la croix, qui va survenir dans quelques heures. En mourant sur la croix, il nous rend le service de prendre notre place. Il meurt pour nous. Vous comprenez pourquoi la croix est notre fierté. Par elle, nous sommes sauvés de la mort. En elle, nous avons le salut, la vie et la résurrection.

 

Vous saisissez également pourquoi le Christ nous invite à célébrer l’Eucharistie. Celle-ci est le sacrement de son amour. C’est-à-dire que l’Eucharistie rend présent toujours et partout l’événement unique du don que le Christ nous fait de lui-même. Comme l’énoncera tout à l’heure la prière sur les offrandes : « Chaque fois qu’est célébré ce sacrifice en mémorial, c’est l’œuvre de notre Rédemption qui s’accomplit. »

 

L’évangile nous présente la mort de Jésus comme « l’heure » : « Sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout ». Cette heure à laquelle Jésus aspire tout au long de son ministère ; cette heure pour laquelle il est venu dans le monde ; cette heure ne peut pas être dépassée et il faut y revenir constamment. C’est la raison pour laquelle Jésus nous commande : « Faites-cela en mémoire de moi ». Nous revenons effectivement à cette heure en célébrant l’Eucharistie, car cette heure est absolument unique et éternelle. Elle marque le moment où le Christ nous révèle l’amour infini du Père. Elle marque la victoire définitive de l’amour sur la mort.

 

Si le Christ nous commande de célébrer l’Eucharistie, remarquez qu’il nous donne également l’ordre de répéter ses gestes : « C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous ». Voyez comment le Christ nous introduit dans une dynamique nouvelle : « Vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres ». Le Christ nous donne la vie, qu’il reçoit du Père, non pas pour que nous la conservions jalousement, mais pour la redonner, lui permettre de circuler et de profiter à d’autres.

 

Chaque fois que nous célébrons l’Eucharistie, nous sommes nourris du corps et du sang du Christ. C’est-à-dire qu’il vient lui-même vivre en nous, afin que nous puissions, nous aussi, aller avec lui jusqu’au bout de l’amour ; que nous puissions mourir à nous-mêmes, nous donner toujours davantage aux autres et ainsi être victorieux avec lui des puissances de mort.

 

Alors, soyons fidèles à répondre à l’invitation du Seigneur et à participer à l’Eucharistie, source et sommet de la vie chrétienne ! « Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne ».

 

+ Pascal ROLAND