Les prêtres sont un don de Dieu (Homélie pour les ordinations) — Diocèse de Belley-Ars

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Les prêtres sont un don de Dieu (Homélie pour les ordinations)

Ordination à ARS                                             
21 juin 2015
Prêtres : Baudouin d’ORLEANS (Belley-Ars),
Vincent  (Vietnam)
Vincent  (Chine)
Diacre : Gabriel  (Chine)
Lectures : Isaïe 61, 1-3 ; Ps 88 ; 2 Co 5, 14-20 ; Jn 15, 9-17

Les prêtres sont un don de Dieu.

 

Nous avons coutume d’affirmer - et à juste titre – que l’ordination de prêtres est un don que Dieu fait à son Eglise. Mais en quoi consiste précisément ce don que Dieu nous fait ? Et pourquoi ce don est-il si précieux ? Laissons donc résonner la Parole de Dieu que nous venons d’entendre, afin de mieux percevoir quelle est la mission spécifique des prêtres. Ainsi, non seulement, vous ferez un meilleur usage de leur ministère ; mais, également, vous les désirerez plus profondément et entretiendrez un climat favorable à la naissance et à la croissance de vocations de prêtres.

 

Tout d’abord, les prêtres sont des disciples que Dieu a librement choisis et consacrés à l’œuvre du Salut. Jésus l’a signifié très clairement dans l’Evangile que nous venons d’entendre : « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi. C’est moi qui vous ai choisis et établis ». Lorsqu’ils se tiennent en vérité sous le regard du Seigneur, les prêtres savent bien qu’ils n’ont pas été appelés en vertu de qualités exceptionnelles, ni en raison de quelque mérite personnel. Les prêtres sont des êtres fragiles et limités, exactement comme toutes les autres créatures humaines. Ils sont de pauvres pécheurs, n’ignorant pas que le Christ est mort pour eux et qu’ils doivent travailler constamment à leur conversion.

 

Lorsque, comme je viens de le faire, je questionne les formateurs qui me présentent les ordinands et que je leur demande : « Savez-vous s’il ont les aptitudes requises ? », il s’agit de m’assurer que les candidats ont les aptitudes humaines, spirituelles, morales et intellectuelles nécessaires à la mission qui va leur être confiée. Mais parmi toutes les qualités requises, je tiens que la plus indispensable est celle de l’humilité.

 

Saint Jean-Marie Vianney disait, à la suite de saint Augustin : « la première des vertus, c’est l’humilité, la seconde l’humilité, la troisième l’humilité »[1] et il expliquait de manière imagée que l’humilité « est aux vertus ce que la chaîne est au chapelet ; otez la chaîne, tous les grains s’en vont ; ôtez l’humilité et toutes les vertus disparaissent »[2]. Oui, cette disposition d’humilité est capitale, pour toute personne qui reçoit une responsabilité au sein de l’Eglise. Car seul un homme humble se laissera vraiment conduire par l’Esprit Saint et servira convenablement l’œuvre de Dieu. Vous qui allez être ordonnés, ne l’oubliez jamais !

 

Souvenez-vous que lorsqu’il a reçu le sacrement de la confirmation, Jean-Marie Vianney s’est placé sous le patronage de saint Jean-Baptiste. « Pour Jean-Marie, le Baptiste est un idéal sur lequel il veut calquer sa vie. Surtout, Jean-Marie Vianney est en consonance avec la spiritualité de l’effacement du Précurseur. Ses paroles : ‘il faut qu’il croisse et que je diminue’ le rejoignent en profondeur. Sa crainte permanente sera d’attirer les regards sur lui. Il aura le souci surtout de laisser passer Dieu devant lui ! »[3], écrivait Mgr Bagnard lors de l’année sacerdotale (2009-2010).

 

Vous aussi, imitez donc saint Jean-Baptiste et saint Jean-Marie Vianney : soyez humbles, laissez vous conduire par l’Esprit Saint, effacez-vous derrière le Christ, qui est le seul Sauveur ! Comme le demande saint Paul, n’ayez plus votre vie centrée sur vous-mêmes, mais sur le Christ qui est mort et ressuscité pour vous. N’ayez d’autre ambition que de faire connaître et aimer celui qui manifeste qu’ « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ».

 

« Ce n’est pas vous qui m’avez choisi. C’est moi qui vous ai choisis et établis » Tout en étant d’abord et fondamentalement des disciples du Christ, frères au milieu de leur frères, les prêtres ne sont pas élus par la communauté chrétienne. Mais ils sont choisis et établis par le Christ. Ainsi ils se présentent en vis-à-vis de toute assemblée chrétienne, pour manifester à celle-ci qu’elle n’est pas un groupe qui s’autogérerait, suivant des principes démocratiques, selon les modèles associatifs courants. Tout prêtre signifie à la communauté ecclésiale que celle-ci reçoit son existence du Christ et qu’elle se rassemble en son nom, en réponse à l’appel du Père.

 

D’autre part, le prêtre préserve la communauté ecclésiale du repli égoïste et mortifère, en lui rappelant qu’elle n’est pas d’abord faite pour elle-même, mais toujours en vue de la mission reçue du Christ, celle de proclamer la Bonne Nouvelle à toute la création (Mc 16, 15).

 

Vous le constatez, la mission des prêtres est capitale. Car ils sont les garants de la véritable identité de l’Eglise. Les prêtres, c’est la présence sacramentelle du Christ. Ils nous signifient de manière très concrète que le Corps que nous formons n’a de consistance, de vie et d’unité qu’en vertu de la Tête, qui est le Christ lui-même.

 

« Oh, que le prêtre est quelque chose de grand ! (…) » disait le curé d’Ars. « Le prêtre n’est pas prêtre pour lui. Il ne se donne pas l’absolution. Il ne s’administre pas les sacrements. Il n’est pas pour lui : il est pour vous »[4].

 

 

Ensuite, les prêtres sont des ministres de la réconciliation. Nous venons d’entendre l’apôtre Paul affirmer : Dieu « a déposé en nous la parole de la réconciliation. Nous sommes donc les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui lance un appel : nous le demandons au-nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu ».

 

Notre monde a certes un grand besoin de réconciliation. C’est pourquoi le pape François a voulu un jubilé extraordinaire de la miséricorde. Il enseigne que « Jésus-Christ est le visage de la miséricorde du Père » et que « Le mystère de la foi chrétienne est là tout entier »[5]. Et il souhaite ardemment « que les années à venir soient comme imprégnées de la miséricorde pour aller à la rencontre de chacun en lui offrant la bonté et la tendresse de Dieu »  (n° 5). Les prêtres ont pour première mission d’annoncer à tous la miséricorde de Dieu. Ils doivent aider les communautés chrétiennes à proposer la miséricorde de Dieu « avec une enthousiasme nouveau et à travers une pastorale renouvelée » (n° 12).

 

Ministres du sacrement du pardon, les prêtres doivent être « un véritable signe de la miséricorde du Père ». « Chaque confesseur doit accueillir les fidèles comme le père de la parabole du fils prodigue : un père qui court à la rencontre du fils, bien qu’il ait dissipé tous ses biens. Les confesseurs sont appelés à serrer sur eux ce fils repentant qui revient à la maison, et à exprimer la joie de l’avoir retrouvé. Ils ne se lasseront pas non plus d’aller vers l’autre fils resté dehors et incapable de se réjouir, pour lui faire comprendre que son jugement est sévère et injuste, et n’a pas de sens face à la miséricorde du Père qui n’a pas de limite » (n° 17).

 

Pasteurs du troupeau, les prêtres sont aussi ceux qui doivent réveiller la conscience souvent endormie de leurs ouailles et les entraîner à développer les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Il s’agit d’aider chacun à «ouvrir le cœur à ceux qui vivent dans les périphéries existentielles les plus différentes, que le monde moderne a souvent créées de façon dramatique » (n° 15).

 

Ministres de la réconciliation, les prêtres doivent brûler du zèle qui dévorait saint Jean-Marie Vianney : « Oh que nous sommes insensés ! Le Bon Dieu nous appelle à lui et nous le fuyons ! Il veut nous rendre heureux et nous ne voulons point de son bonheur ! (…) Que le Bon Dieu est bon, mes enfants, qu’il est miséricordieux envers les pécheurs, quand ils se repentent et qu’ils sont fâchés d’avoir offensé un Dieu si bon. Il pardonne tous les péchés, quelque nombreux qu’ils soient et quand même ils sont bien grands »[6]

 

 

Enfin, les prêtres sont les ministres de la communion universelle. Les prêtres doivent être ceux qui enseignent le commandement de la charité fraternelle : « Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés ». Les prêtres rappellent, à temps et à contretemps, qu’il s’agit là d’un commandement du Seigneur, et non pas d’une matière à option. « Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres »

 

Aimez les uns, c’est facile ! Aimer ceux qui sont mes amis, aimer ceux qui pensent comme moi : là, aucune difficulté majeure ! Jésus le constate et le souligne lui-même : « Même les pécheurs aiment ceux qui les aiment. Si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle récompense méritez-vous ? Même les pécheurs en font autant ! » (Luc 6, 32-33). Mais aimer les autres est chose moins aisée ! Ceux qui ne sont pas de mon milieu social, ceux qui appartiennent à un autre bord politique, ceux qui n’ont pas les mêmes goûts, ceux qui ne partagent pas mes idées…

 

Nous le savons par expérience, un amour sélectif blesse davantage l’humanité qu’il ne la construit. Une solidarité de milieu ou au nom d’intérêts particuliers génère des divisions et participe aux multiples fractures sociales et spirituelles de l’humanité. Il nous faut aimer tous les hommes, si nous voulons être d’authentiques disciples du Christ. Cet amour d’autrui se fonde dans la reconnaissance de ce qu’est l’autre : comme moi, il est une personne inconditionnellement aimée par Dieu, lui aussi. « Aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car lui, il est bon pour les ingrats et les méchants. Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (Luc 6, 35-36).

 

Les prêtres replacent constamment tous et chacun devant cette exigence de l’amour mutuel, et ouvrent inlassablement à l’œuvre de l’Esprit Saint. Ils nous poussent à dépasser nos refus d’aimer. Ils nous entraînent à vaincre nos résistances et à combattre nos découragements. Ils nous répètent avec St Jean : « Si quelqu’un dit « j’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas » (I Jean 4, 20)

 

Pour cela, les prêtres, nous replacent toujours devant la personne du Christ, devant celui qui nous aime le premier, et qui nous révèle notre vocation à l’amour. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Aimer, ce n’est pas attendre d’être reconnu, ce n’est pas agir de manière intéressée ou possessive. mais c’est se donner, se livrer gratuitement et inconditionnellement ; se donner sans jamais se lasser et s’offrir sans réaliser d’exclusive.

 

Il convient de souligner ici le sens du célibat sacerdotal. Répondant à un appel personnel du Seigneur, les ordinands ont librement et volontairement choisi de vivre le célibat selon l’exemple du Christ. En renonçant librement à fonder une famille, et donc en renonçant à un amour particulier, ils se sont rendus disponibles pour un amour universel. Ainsi, avec le Christ, ils se feront tout à tous et manifesteront le caractère universel de l’amour du Père.

 

Pour finir, je voudrais souligner le caractère central de l’Eucharistie. Nous savons que sans l’amour du Christ, nous sommes profondément indigents. Seul le Christ réalise la totale communion fraternelle entre les hommes. Et ce n’est qu’en lui étant unis, que nous sommes aptes à aimer en vérité. C’est pourquoi lui-même nous ordonne : « Demeurez dans mon amour ! »

 

Pour demeurer dans l’amour du Christ, nous disposons du trésor incomparable de l’Eucharistie. Là réside la source d’amour éternellement jaillissante. C’est dans la célébration de l’Eucharistie que nous buvons à la source vivifiante. C’est là aussi que nous apprenons à nous offrir avec le Christ. C’est pourquoi nous avons besoin de prêtres ! Sans eux nous serions privés de l’Eucharistie, source et sommet de la vie chrétienne ! Sans eux, le monde ne saurait pas à quel point il est aimé de Dieu. Sans eux, le monde n’apprendrait plus à aimer comme Dieu nous aime…

 

Baudouin, Vincent, Vincent et Gabriel, choisis par le Seigneur, consacrés par l’onction, envoyés pour annoncer à tous la Bonne Nouvelle, ambassadeurs du Christ, chargés du ministère de la réconciliation, amis auxquels Jésus fait connaître tout ce qu’il a entendu de son Père, demeurez fidèlement dans son amour, gardez ses commandements, laissez-vous conduire par l’Esprit et vous porterez un fruit qui demeure, parce qu’il ne viendra pas de vous, mais de Dieu lui-même !

 

 

+ Pascal ROLAND

 

 

 

[1] Mgr René Fourrey, Ce que prêchait le curé d’Ars, page 267

[2] Cité par Mgr Guy-Marie Bagnard, Le curé d’Ars, portrait d’un pasteur, page 31

[3] Mgr Guy-Marie Bagnard, Le curé d’Ars, portrait d’un pasteur, page 25

[4] Mgr René Fourrey, Ce que prêchait le curé d’Ars, page 85

 

[5] Bulle d’indiction du jubilé extraordinaire, Misericordiae Vultus, n° 1

[6] Mgr René Fourrey, Ce que prêchait le curé d’Ars, pages 253 et 255