Biographie de Mgr Devie, évêque de Belley — Diocèse de Belley-Ars

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Biographie de Mgr Devie, évêque de Belley

MONSEIGNEUR ALEXANDRE RAYMOND DEVIE, 
(1767-1852)

Evêque de BELLEY
(1823-1852)

 

Le 23 juillet 1823, la ville épiscopale de Belley accueillait joyeusement son nouvel évêque. Or, le diocèse dont l’évêque de Belley recevait la charge n’était plus confiné au Bas Bugey, avec ses parties savoyarde et dauphinoise.  Il comprenait tout le département de l’Ain, à savoir les paroisses bugistes relevant de l’antique diocèse, celles relevant des diocèses de Genève-Annecy, de Saint-Claude, de Macon et, pour l’essentiel, de Lyon. Diversité liée à l’Histoire, riche de promesses, mais qui, tout compte fait, rendait complexe la tâche du nouvel évêque. Lequel avait décidé de s’établir à Belley, dont il avait le titre, et où il y avait un évêché en bon état pour l’accueillir.

Il s’appelait Alexandre Raymond DEVIE, Devie comme l’arbre de vie dessiné sur son blason épiscopal.

La Providence l’avait bien préparé à la tâche. Originaire de Montélimar, dans le diocèse de Valence, après avoir traversé, non sans péril, la Révolution, il avait été, au Concordat, vicaire à Montélimar, puis envoyé comme professeur de théologie morale au Grand Séminaire de Viviers en Ardèche. En 1813, l’évêque de Valence le rappela auprès de lui pour en faire son vicaire général. En 1815, à la mort de l’évêque, Mgr Devie fut chargé avec trois autres prêtres de l’administration du diocèse de Valence. Il semble avoir eu la part principale dans cette fonction, en attendant la nomination d’un nouvel évêque, qui tarda. En 1819, le nouvel évêque le garda comme vicaire général. Et en 1823 il fut désigné comme évêque de Belley.

Subsistent de lui des portraits, peu à son avantage, celui d’un vieil homme au visage osseux, au regard voilé derrière des lunettes de fer mal assujetties. On l’a portraituré quand il était un grand vieillard et que, notamment, une maladie des yeux le handicapait. Au séminaire de Viviers existe un portrait de lui, relativement jeune, et qui le présente tout autrement. Une médaille dont le dessin est du sculpteur Cabuchet le représente austère, intelligent et actif. Par ailleurs, les innombrables visites pastorales qu’il fit et sa capacité à endurer les fatigues, y compris dans de nombreux voyages et parcours à pied, montrent une résistance physique peu commune.

Son premier biographe témoigne de sa puissance de travail extraordinaire. Se contentant de six heures de sommeil, son seul délassement était de passer d’une occupation à l’autre. Avec cela une intelligence vive, une manière active et précise à suivre les choses, une capacité à choisir ses proches collaborateurs et à mettre en place de nombreux projets. Il avait aussi un don d’écrivain qui non seulement lui permit de s’expliquer facilement, mais, aussi, de le faire avec une clarté et un don de la persuasion remarquable. Homme d’une foi profonde et d’une grande piété, il est aussi homme de la continuité et de la ténacité.

A l’écart des modes du XVIIIème siècle, Jansénisme comme esprit des Lumières, qu’il connait pour en avoir travaillé les auteurs et en avoir analysé les effets, il est ouvert à tous les domaines de la connaissance. Sa théologie suit celle de saint Alphonse de Liguori, dont il apprécie la pensée joyeuse et miséricordieuse et ce, dès 1792. Sa connaissance de celui-ci va d’ailleurs bien au-delà. Il s’inspire de sa relation au monde et de ses méthodes dans les divers domaines de la pastorale.  S’il soutient le bon usage de la Raison, il est sensible à ce qui est beau, dans la liturgie, comme dans les Beaux-Arts. 

Arrivé en juillet 1823, l’évêque nouvellement consacré prend à la fin de la même année toutes les dispositions principales pour que le nouveau diocèse fonctionne de façon autonome et cohérente et s’ouvre vers un avenir ecclésial prometteur.

D’abord il veut rencontrer ses prêtres. Il les convoque pour septembre, en deux retraites de 150 chaque fois. Ces retraites qu’il prêcha contribuèrent beaucoup à réunir les prêtres du nouveau diocèse autour de leur évêque pour une action sacerdotale bien ordonnée.

Dès l’automne 1823, l’évêque s’active pour ouvrir son Grand Séminaire dans l’ancien monastère de Brou qui lui a été concédé par la Ville de Bourg. Il lui fallait trouver un corps professoral à la mesure de l’enjeu : il demanda aux sulpiciens de Lyon de lui rétrocéder Mr Perrodin, dont il fit le directeur ; prêtre d’exception par sa richesse intellectuelle et spirituelle, homme de cœur, il va influencer durablement la vie du diocèse. Outre Mr Portalier, autre directeur sulpicien, il va choisir des curés de paroisse aguerris. Dès 1826, Mgr Devie pourra ordonner en moyenne 20 prêtres par an : il aura bientôt 600 prêtres. En même temps, il s’occupe d’organiser ses petits séminaires. Pour la Bresse, il y avait celui de Meximieux que l’action vigoureuse de Mr Rivet avait reconstitué depuis 1807. Il obtient le collège de Belley pour le Bugey, grâce à sa ténacité et grâce à la complaisance de Mgr de  Fraissinous qui l’avait consacré. Les Pères Maristes, à qui il avait été confié, créent même un petit pensionnat destiné aux élèves externes exigés pour obtenir l’ouverture et qui ne pouvaient être logés chez leurs parents.

Dans le même temps, il se préoccupe des vocations féminines consacrées. Il se tourne vers les sœurs de Saint Joseph de Lyon qui avaient en 1823 dans l’Ain 26 établissements. Celles qui étaient sur le territoire de l’Ain sont regroupées dans une Congrégation du diocèse de Belley. Très vite, l’évêque fera acheter, à Bourg, l’ancien local des Dominicains où sera construite une chapelle. A la mort de Mgr Devie, il y aura plus de 1000 religieuses de Saint Joseph dans le diocèse, affectées à l’éducation des enfants et des jeunes, à l’intendance des maisons religieuses et aux soins dans les hôpitaux : c’est sous l’épiscopat de Mgr Devie que s’organisent les deux grandes maisons d’aliénés de la Madeleine et de Saint Gorges, tenus par les sœurs de Saint Joseph. Il soutient d’autres engagements : Bernardines, à Belley, Visitandines, à Gex, Montluel, Bourg ; Sœurs de Saint Vincent de Paul, Ursulines. Des circonstances et des rencontres providentielles l’amèneront à accompagner de nouvelles fondations féminines ou masculines : Sœurs de la Croix de Jésus, Pères de la Croix, Pères Maristes, Frères de la Sainte Famille.

Dès les premières années de son épiscopat, Mgr Devie déploie une activité lucide et vigoureuse pour donner vie à ce nouveau diocèse. Il lui faut connaître son diocèse. Dès 1823, il envoie à tous ses prêtres un questionnaire imprimé où était demandée toute une série de renseignements : la population de la paroisse, l’état de l’église et du presbytère, les moyens de subsistance du clergé, l’état de la pratique religieuse, les usages religieux et superstitieux, etc. Les réponses furent très nombreuses. Enquête que Mgr Devie renouvela quelques années plus tard. Mais il importait à l’évêque de se rendre compte sur place et par lui-même de la réalité et par sa venue de manifester l’existence de l’Eglise diocésaine. C’est pourquoi il entreprit dès son arrivée la série de ses visites pastorales. D’abord en 1823 Bourg, Trévoux et Ferney. Et, à partir de 1824, il consacra chaque année plusieurs mois à parcourir les paroisses de son diocèse et à rencontrer prêtres et fidèles. La population était essentiellement rurale, nombreuse et en développement démographique important. Mais les conditions de circulation étaient plus qu’incommodes. Il lui arriva de finir le parcours à pied et dans la boue. Durant son épiscopat, il parviendra à visiter sept fois l’ensemble de son diocèse. Si la paroisse de Ferney est de sa part l’objet d’une attention particulière, il suit avec bienveillance les progrès de celle d’Ars dont il défendra toujours le curé, disant en 18354 à Jean-Marie Vianney : « Allez, M. le curé, rentrez à Ars, on a trop besoin de vous là-bas. » Répit que, dans sa volonté de la mission, il n’accorda pas, malgré les demandes réitérées du saint curé. Cette volonté de la mission il voulut l’imposer au Père Colin en lui proposant la direction du petit séminaire de Belley. Lequel finit par obtenir de Rome l’approbation des règles du nouvel Institut religieux des Pères Maristes et la perspectives d’horizons autres et lointains. Il fut le seul à encourager le Frère Gabriel Tabourin dans sa création d’une congrégation originale. Discernant les qualités de l’entreprise de Frère Tabourin, tout en l’avertissant sans ménagement de ses défauts, il lui fit confiance.

C’est que Mgr Devie était très attentif à l’éducation globale de la jeunesse. Outre les deux petits séminaires, il y eut sous son épiscopat quatre maisons dispensant l’enseignement secondaire, tout en assurant en même temps une éducation chrétienne : à Ferney, à Nantua, à Thoissey, à Ménestruel (Poncin). Il soutint la création de la Saulsaie, près de Montluel. Outre une ferme modèle, le propriétaire y adjoignit une école d’agriculture dont le but était de former des agriculteurs avisés pour la Dombes. 

S’il veilla à confier ces tâches nécessaires à la mission, il fit par lui-même tâche d’enseignant. Si n’ont pas été édités ses sermons ordinaires, il publia chaque année des textes pour le Carême ou pour des événements de la vie de L’Eglise. Il y développait des réflexions sur la foi et sur l’Eglise. Il a par ailleurs publié toute une série d’ouvrages destinés à accompagner ses prêtres : Méthode pratique pour faire le catéchisme-Tableau abrégé des devoirs d’un prêtre- Correspondance d’un ancien directeur de séminaire avec un jeune prêtre sur la politesse-… Ouvrages dans lesquels il se montre esprit ouvert, bienveillant, et un écrivain agréable à lire.

Par ailleurs il écrivit un Rituel de Belley qu’il publia en trois volumes, auxquels il en ajouta un quatrième. Dans ce Rituel, il adoptait la liturgie lyonnaise, que connaissaient les prêtres originaires de l’ancien diocèse, rituel qu’il accompagne de conseils pratiques sur la manière de donner les sacrements. Remarquable rituel par la qualité de ses conseils, mais aussi, et surtout, par la place  donnée à la théologie morale de saint Alphonse de Liguori, notamment en ce qui concerne l’attitude miséricordieuse du confesseur à l’égard de ses pénitents. Ce qui ne fut pas sans influence sur le curé d’Ars.

Homme de prière tourné vers la vénération des saints, persuadé de l’effet éducatif que constituaient pour ses prêtres, comme pour les fidèles, les divers modèles de sainteté dont le diocèse de Belley lui procurait de nombreux exemples, il s’appliqua à redonner au culte des Saints authenticité, ampleur et vigueur. 

S’il se fit lui-même missionnaire dans son diocèse par ses visites et ses écrits, il voulut que se multiplient dans les paroisses les temps sortant de l’ordinaire et développer l’aspect missionnaire. C’est pourquoi il créa une communauté de missionnaires, qui, de Pont-d’Ain, allaient bientôt rejoindre Ars. Si l’action de ceux-ci transforma durablement la pratique religieuse des habitants de l’Ain, le paysage en fut lui-même marqué : innombrables sont les croix qui rappellent le temps de la mission. Il alla plus loin en encourageant les Pères maristes dans leur désir d’aller évangéliser hors de France, mais inversement offrit l’accueil pour la formation des prêtres nord-américains, après avoir laissé partir vers ce continent un certain nombre de prêtres diocésains de Belley dont certains devinrent de remarquables évêques des tout jeunes Etats-Unis.

Considérant qu’il était de sa fidélité à l’Evangile d’accompagner la vie des fidèles, il voulut aider chacun d’eux à assumer au mieux ses activités terrestres. C’est sous son épiscopat que certaines parties du département connaissent les premiers développements industriels et les premiers emplois ouvriers à plein temps. Aussi Mgr Devie est-il particulièrement soucieux d’accompagner les chefs d’industrie et leurs employés dans la marche vers la Révolution industrielle. C’est l’époque de ce qui ne se voit nulle part ailleurs, des utopies, et qu’illustre à sa manière l’usine-pensionnat de Jujurieux, avec les Sœurs de Saint-Joseph et le chef d’entreprise Claude-Marie Bonnet. Préoccupation de la totalité de la vie humaine qui se manifeste aussi dans le soin qu’il apporta à créer un lieu d’accueil au château de Pommiers, puis à celui de Pont d’Ain pour les prêtres âgés de son diocèse, mettant en place un système mutualiste et anticipatif.

L’explosion démographique qui a cours pendant son épiscopat amène Mgr Devie à demander à ses curés de procéder à des constructions ou embellissements d’églises. C’est pour cela que, avec un art consommé, nourri de connaissances encyclopédiques, il ajoute un quatrième volume à son   contenant toutes sortes de conseils concernant l’architecture des églises. 

Bâtisseur de l’Eglise de l’Ain, il eut à se préoccuper de sa cathédrale de Belley. Dès 1824, il demanda au ministre des Cultes de subventionner la reconstruction de la façade et d’un clocher mal réparé. De 1835 à 1841, sur le projet de l’architecte Chenavard se firent les premières reconstructions. Lesquelles furent accompagnées entre 1845 à 1851 d’une nouvelle nef et d’un nouveau transept. Dans sa cathédrale reconstruite il eut la joie de consacré son coadjuteur, Mgr Georges Chalandon, qui devait lui succéder. Il eut la force de prêcher le carême de 1852 et remit son âme à Dieu le 25 juillet 1852, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans.

Mgr Devie est considéré à juste titre comme le nouveau fondateur du diocèse de Belley. En trente ans d’épiscopat, il avait doté son Eglise diocésaine d’institutions solides et efficaces, mobilisant prêtres, religieux et religieuses, fidèles de tous âges. De plus, son action et ses écrits pour la formation du clergé, les missions organisées dans les paroisses, d’autres initiatives encore, avaient donné à ce diocèse un dynamisme incontestable auquel le rayonnement du saint curé d’Ars, le martyre de saint Pierre Chanel, vinrent ajouter leur éclat, sans compter le rayonnement intellectuel de certains membres de son clergé et l’exemple de la probité scientifique donné par l’abbé Gorini, petit curé de La Tranclière. Il eut à donner ses conseils dans des situations difficiles vécues dans des diocèses français. Aussi, vers 1840, quand il est dans la force de son épiscopat, il était considéré par le gouvernement comme un des meilleurs évêques de France et on lui offrit le siège de l’archevêché de Reims et de Paris, offres qu’il déclina.

 

Biographie réalisée à partir des paragraphes globalement conservés, réécrits, remodelés, réduits, parfois enrichis de l’article du Chanoine Jean Charbonnet