Qu’avons-nous fait de la vigne que nous a confié le Seigneur ? — Diocèse de Belley-Ars

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Qu’avons-nous fait de la vigne que nous a confié le Seigneur ?

Homélie de Didier Berthélémy, diacre permanent, le dimanche 4 octobre 2020.
(Lectures : Mt 21, 33-43 les vignerons homicides ; Isaïe 5, 1-7)

Aujourd’hui, nous fêtons la Saint François d’Assise, occasion de fêter la Création, de prendre un peu de recul pour l’admirer et la recevoir comme un don de Dieu. Au travers de l’image de la vigne, les textes de la liturgie de ce jour nous invitent à la conversion. Ils nous invitent à nous poser la question de ce que nous avons fait de cette Création au centre de laquelle Dieu a mis la Vie de l’homme.

Dans la 1ère lecture, il y est question d’une vigne abandonnée, une vigne qui ne porte pas de fruit, une vigne devenue sauvage, envahie par les ronces. Pourtant, cette vigne avait tout pour produire de beaux raisins. Son maître avait choisi une bonne terre fertile sur un coteau bien exposé. Il y avait planté un plan de qualité. Il avait mis tout son cœur à s’occuper de cette vigne et toute sa passion. Il en attendait l’abondance, mais il n’a récolté que déception et désolation. 

Dans l’évangile, la vigne a bien porté du fruit. Mais ce sont les vignerons qui vont se révéler indignes de la confiance que le propriétaire leur a faite. Ils vont rompre le contrat qui les lie à lui. Ils ne vont plus accepter d’être de simples gérants mais ils vont vouloir prendre possession de la vigne pour agir à leur gré et ne plus avoir à rendre des comptes à quelqu’un. 

Et nous, qu’avons-nous fait de la vigne que nous a confié le Seigneur ?

En méditant sur ces textes, me sont revenus en mémoire deux articles de journaux lus ces jours derniers ; deux articles qui m’ont alerté et bousculé. Il y était question d’un sujet difficile à aborder tant il suscite des réactions tranchées et parfois très vives. Un sujet plein d’épines et de ronces comme la vigne dans le texte d’Isaïe. Je veux parler de l’avortement. Je sais que ce peut être aussi un sujet douloureux. Et je vous demande pardon par avance si mes propos, même mesurés, venaient à blesser l’un ou l’autre d’entre vous. 

Dans un premier article donc, il était rapporté que dans la nuit du 1er août à l’Assemblée Nationale, un amendement surprise avait été voté alors que très peu de députés étaient présents ; amendement qui modifie les critères d’accès à l’IMG (avortement thérapeutique). Je donne brièvement quelques éléments de compréhension. A ce jour, seuls deux critères autorisent une femme à avoir recours à une IMG : 1er critère : La grossesse met gravement en danger la santé de la femme enceinte. 2ème critère : L’enfant à naître est atteint d’une affection particulièrement grave et incurable. Par exemple: la trisomie 21. En France, l’IVG ne peut pas être pratiqué au-delà des 12 premières semaines de grossesse. Par contre, l’IMG elle, peut être pratiquée sans aucune limite de délai, c’est-à-dire en théorie jusqu’au terme de la grossesse. Au passage, permettez-moi cette remarque : à 5 ou 6 mois de grossesse, tous les « enfants à naitre » n’ont de fait pas la même chance. Pour certains, on va déployer des moyens techniques exceptionnels pour que, même s’ils sont grands prématurés, ils puissent vivre. Pour d’autres, pourtant au même stade de grossesse, souvent d’ailleurs parce qu’ils sont porteurs de handicaps, on va interrompre là leur vie naissante. Pourquoi donc une telle différence de traitement ? Un enfant à naitre porteur de handicap serait-il donc moins respectable ? Sa vie aurait-elle moins de prix ? 

Mais, ça c’est la situation d’aujourd’hui. C’est ce que nos lois autorisent déjà. Mais, l’amendement qui a été déposé veut aller encore plus loin. Il rajoute un 3ème critère pour permettre un accès encore plus large à l’IMG : « la détresse psycho-sociale » de la femme. 

Ce qui est grandement à craindre, c’est que ce critère-là, suffisamment flou, permettra en fait de pouvoir pratiquer légalement des IVG au-delà du délai des 12 semaines en les « déguisant » en IMG. C’est un glissement très grave !

Dans un autre article, il est fait mention d’un rapport sur l’accès à l’IVG commandé par le gouvernement et qui a été déposé le 16 septembre à l’Assemblée Nationale, rapport qui dans la foulée doit donner lieu à une proposition de loi. Au fil de ce rapport, les auteurs pointent ce qu’elles considèrent comme des freins à l’application de la loi Veil et formulent 25 recommandations. Je vous en cite deux : Supprimer la clause de conscience des personnels de santé. Et repousser à 14 semaines de grossesse le délai légal. Pour cette dernière proposition, dans ce même article, le professeur Israël NISAND (président du collège national des gynécologues obstétriciens) qui n’est pourtant pas quelqu’un qu’on peut taxer de conservateur ou de pro-vie, explique que cet allongement serait une catastrophe s’il était adopté par la loi car, pardonnez-moi ces détails sordides mais je cite les propos du professeur Nisand, la tête du fœtus est à cet âge ossifié et l’opération chirurgicale obligerait à l’écraser, ce que de nombreux médecins refuseraient de faire.

Frères et sœurs, que faisons-nous de la vigne que nous a confié le Seigneur ? Il « en attendait le droit, et voici le crime. Il en attendait la justice, et voici les cris ! » nous dit le prophète Isaïe dans la 1ère lecture. 

Qu’avons-nous fait de cette vigne? L’avons-nous oubliée, abandonnée aux ronces et aux épines comme dans le texte d’Isaïe? L’avons-nous laissée aux mains de vignerons peu scrupuleux qui en ont fait leur bien, la cultivent à leur unique profit au nom de leur liberté égoïste, comme dans l’Évangile ?

Les textes de ce jour nous invitent à une prise de conscience. Et il nous faut prendre au sérieux l’avertissement que Jésus adresse dans l’Évangile aux grands prêtres et aux anciens du peuple, quand il leur dit que le Royaume de Dieu leur sera enlevé pour le donner à d’autres qui lui feront produire ses fruits. Car aujourd’hui c’est peut-être bien à nous que cette parole est adressée. Cette parole n’est ni une menace ni une prédiction. Elle nous est adressée pour nous secouer. Car nous nous sommes peut-être laissés endormir, ne voyant plus autour de nous les ronces avancer pour étouffer le dessein du Seigneur. Nous sommes un peu comme la grenouille qu’on a plongée dans de l’eau tiède et qui ne sent pas que le feu augmente pour la cuire. Frère et sœurs, il nous faut réagir, nous repentir de notre paresse, de notre aveuglement, de notre manque de courage. Nous savons bien que nous manquons de fidélité à bâtir le Royaume de Dieu, et que seul le pardon de Dieu peut nous relever. Le Seigneur connait notre faiblesse. Il est prompt à nous pardonner. Frères et sœurs, que ce pardon nous remette debout et nous donne de nous tourner résolument vers la Vie. 

Avec le psalmiste, nous pouvons crier vers Dieu :

Seigneur, Dieu de l’univers, fais-nous revenir ;
que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés.

Choisir la Vie, cela peut prendre autant de formes que nous sommes ici rassemblés. Nous sommes tous questionnés profondément par les temps que nous vivons. Notre « maison commune » se couvre de ronces. Mais nous ne la sauverons pas sans sauver la Vie !

Pour terminer, permettez-moi un court témoignage. Il y a 25 ans, nous présentions notre fils William à l’Église afin qu’il soit baptisé au cours de la messe comme le font Laurent et Laurence aujourd’hui pour Samuel. Hasard du calendrier, le psaume de la liturgie de ce dimanche était le psaume 118, le psaume que Jésus cite dans l’Évangile de ce jour : « La pierre qu’ont rejeté les bâtisseurs est devenu la pierre d’angle. C’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux ». J’ai encore le souvenir très net de ce que nous avions dit ce jour-là pour présenter notre demande. Nous avions dit: « William est porteur de trisomie 21. Beaucoup d’entre vous savent que nous l’avons adopté. Par ce baptême, puisse cette pierre que des bâtisseurs avaient rejetée devenir pierre d’angle pour notre famille et pour l’Église ». 

Frères et sœurs, la présence des plus fragiles nous est précieuse si nous voulons construire en vérité la vie de nos familles, de nos communautés, de notre société. Ils font partie eux aussi de cette Création. Et ils y ont une place privilégiée. 

Dans quelques instants, Samuel sera baptisé. Avec Samuel, avec ses parents, parrain, marraine, nous allons célébrer la Vie. Nous sommes faits pour la Vie ! La Vie avec un grand V. La Vie en plénitude. En traversant la mort, le Christ nous a ouvert définitivement ce chemin vers la Vie. Eh bien, que ce que nous allons vivre dans quelques instants soit pour chacun de nous aussi l’occasion de plonger avec Samuel dans les eaux du baptême, afin de nous tourner résolument vers la Vie. Amen.

 

Didier BERTHELEMY - Diacre permanent.

 

 

VIOLENCES, CATASTROPHES NATURELLES, BIOÉTHIQUE…
NOTRE SOCIÉTÉ EST-ELLE FRATERNELLE ?


1. Le Conseil permanent des évêques de France, réuni les 5 et 6 octobre 2020, salue la publication de l’encyclique Fratelli Tutti, Tous frères. Le pape François nous y offre un grand texte. La foi en Dieu créateur et père de tous nous fait reconnaître en tous les êtres humains des frères et des sœurs à recevoir librement et joyeusement. La fraternité n’est pas seulement un sentiment ou un impératif moral : elle est une attitude globale qui se vit dans tous les domaines de l’existence. Elle est alors très exigeante, elle bouleverse les constructions sociales, mais elle est source de joie et de vie. L’encyclique appelle notre monde globalisé à ne pas se limiter à l’horizon des mécanismes économiques ou politiques mais à choisir la fraternité avec les pauvres comme perspective d’une politique et d’une économie qui fassent grandir l’humanité. Les diocèses et les paroisses auront à cœur de favoriser et d’accompagner la réception de ce texte.

2. La publication de l’encyclique vient à point nommé pour notre pays, au moment où les autorités publiques s’inquiètent de l’action de groupes qui voudraient soustraire certains quartiers de nos villes aux lois qui régissent notre société. La lutte contre la violence et la surveillance des comportements sont sans doute nécessaires, mais elles resteront insuffisantes et impuissantes, si tous, nous ne travaillons pas à construire des relations de fraternité sans lesquelles la liberté et l’égalité perdent leur sens. La fraternité peut être plus forte que les menées séparatistes, si elle est vécue en vérité, sans naïveté et avec constance. Des lieux de culte chrétiens subissent de plus en plus en souvent des dégradations et, parfois même, des profanations. Des mosquées, des synagogues, des cimetières juifs également, nous ne l’oublions pas. Des personnes sont moquées et parfois agressées et même tuées, en raison de leur appartenance religieuse réelle ou supposée. Les évêques du Conseil permanent regardent avec attention les mesures prises par le gouvernement. Mais une culture du respect, de la connaissance mutuelle, de l’acceptation des autres, ne grandit pas par des injonctions. Les communautés chrétiennes sont appelées par l’encyclique du pape François à trouver un dynamisme nouveau dans cette direction. L’approfondissement de la foi va de pair avec une ouverture de cœur et d’esprit plus grande.

3. Dans quelques jours, le Sénat reprendra la discussion de la révision des lois de bioéthique. Les évêques de France ont, depuis longtemps, fait part de leur inquiétude devant les dispositions du texte voté par l’Assemblée nationale. Depuis quelques semaines, la pression monte à l’Assemblée nationale pour que soient allongés encore les délais de l’avortement sous couvert de droits des femmes et d’égalité, on réduit la filiation à un simple acte de la volonté de ceux ou de celles qui prétendent devenir parents. Un enfant n’est plus accueilli, il est désiré, produit et choisi. Une société peut-elle être fraternelle lorsqu’elle n’a rien de mieux à proposer aux mères en détresse que l’élimination de l’enfant qu’elles portent ? Une société peut-elle être fraternelle lorsqu’elle organise la naissance d’enfants qui n’auront pas de père, tout au plus un géniteur ? Une société peut-elle être fraternelle lorsqu’elle renonce à reconnaître les rôles de la mère et du père, lorsqu’elle ne reconnaît plus que le lieu digne de l’engendrement d’un être humain est l’union corporelle d’un homme et d’une femme qui ont choisi d’unir leur vie pour créer un espace d’alliance et de paix au milieu de ce monde magnifique et dangereux ? Les évêques du Conseil permanent encouragent les parlementaires qui prennent ces sujets au sérieux ; ils invitent tous les citoyens, spécialement les catholiques, à s’informer de ces sujets et à faire connaître leurs réticences et leur opposition aux dispositions annoncées. Notre société ne doit pas se laisser entraîner subrepticement dans une voie dangereuse pour l’avenir de l’humanité.

4. Le pape François nous le rappelle avec force : quoi qu’il en soit des lois, quoi qu’il en soit de la manière dont un être humain vient au monde, chacun, chacune est à l’image et à la ressemblance de Dieu. L’Église catholique accueille tout être humain, quelle que soit son origine et quelles que soient ses opinions, avec respect et espérance. Elle s’émerveille de tout acte de fraternité réelle : ils ont été nombreux pendant le confinement et ils le sont, en ce moment même dans les Alpes-Maritimes durement frappées. Quoi qu’un être humain ait fait, un chemin vers le Père lui est ouvert et il vaut toujours la peine de prendre ce chemin. 


Mgr Éric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims, Président de la CEF,
Mgr Dominique Blanchet, évêque de Belfort-Montbéliard, vice-président de la CEF,
Mgr Olivier Leborgne, évêque nommé d'Arras, vice-président de la CEF,
Mgr Michel Aupetit, archevêque de Paris,
Mgr Jean-Pierre Batut, évêque de Blois,
Mgr Jean-Marc Eychenne, évêque de Pamiers,
Mgr Dominique Lebrun, archevêque de Rouen,
Mgr Philippe Mousset, évêque de Périgueux,
Mgr Matthieu Rougé, évêque de Nanterre,
Mgr Pascal Wintzer, archevêque de Poitiers.